Les plaques tectoniques politiques de la Colombie-Britannique

21 septembre 2024
Les plaques tectoniques politiques de la Colombie-Britannique

Assahafa.com

La Colombie-Britannique a vécu un séisme politique, un vrai. Le 28 août dernier, le chef de l’ancien Parti libéral – l’opposition officielle – décidait d’interdire à ses députés et à ses candidats de se présenter aux élections et se ralliait derrière le Parti conservateur. On verra le 19 octobre prochain comment il aura transformé le paysage politique.

Karin Kirkpatrick a appris la nouvelle en consultant X : le chef de l’opposition officielle de la Colombie-Britannique Kevin Falcon – son chef – déclarait forfait, en son nom et en celui de ses troupes. Le BC United se ferait donc hara-kiri afin d’ouvrir la voie au Parti conservateur et à son dirigeant John Rustad.

L’HISTOIRE JUSQU’ICI

2020 : Le NPD remporte un deuxième mandat sous la houlette de John Horgan. Le Parti libéral demeure l’opposition officielle.

Juin 2022 : John Horgan annonce qu’il quitte son poste pour des raisons de santé. David Eby le remplacera comme chef du NPD et premier ministre en novembre.

Août 2022 : John Rustad est expulsé du Parti libéral après avoir remis en question la science du changement climatique.

2023 : En difficulté dans les sondages, la formation est renommée BC United, dans l’espoir de prendre ses distances du Parti libéral du Canada aux yeux de l’électorat.

« Des collègues de caucus qui étaient en poste depuis longtemps, y compris certains qui ont été ministres, ont appris sur le réseau social que leur nom avait été retiré du bulletin de vote, et qu’ils n’étaient plus candidats pour BC United », explique la députée sortante en entrevue.

 Il y a de nombreux exemples dans l’histoire politique d’un caucus qui demande à son chef de partir, mais il y a très peu d’exemples – s’il en existe – d’un chef qui chasse son caucus et qui suspend une campagne électorale », renchérit le ministre néo-démocrate sortant des Relations autochtones, Murray Rankin.

Avant d’être rebaptisée BC United, la formation était connue sous le nom de Parti libéral de la Colombie-Britannique. Le triomphe des néo-démocrates de John Horgan au scrutin de 2020 a été difficile à encaisser pour le parti, et ensuite, la marque libérale a perdu de son lustre.

« Kevin Falcon et son équipe se sont dit : “On va changer la marque libérale, parce qu’on pense que ça nous nuit, on va s’appeler BC United.” Un mois plus tard, dans les premiers sondages, ils ont perdu 15 points de pourcentage. Ça n’a jamais collé », raconte Philippe J. Fournier, spécialiste en sondages.

« Dans les derniers sondages qu’on avait, BC United était à 9, 10, 11 %, et ils s’en allaient vers une récolte d’aucun siège », ajoute-t-il.

C’est dans ce contexte que Kevin Falcon a annoncé le 28 août dernier qu’il abdiquait, en faveur de son rival conservateur John Rustad.

L’alliance de circonstance pourrait mener à l’élection d’un premier gouvernement conservateur – BC United est considéré comme de centre droit – pour la première fois depuis des décennies, le 19 octobre prochain.

Et même si la campagne électorale ne doit être lancée que le 21 septembre prochain, les effets de ce tremblement de terre politique se font déjà ressentir.

« Ça a radicalement transformé la façon dont la campagne devait normalement se dérouler », croit Stewart Prest, politologue à l’Université de la Colombie-Britannique.

En l’espace de quelques jours seulement, le premier ministre néo-démocrate David Eby a effectivement retourné sa veste sur des enjeux majeurs.

Lui qui était en faveur de la taxe sur le carbone instaurée en 2008 en Colombie-Britannique a promis que celle-ci passerait à la trappe si Ottawa éliminait la sienne⁠1.

Lui qui était farouchement opposé au traitement forcé de personnes aux prises avec des problèmes de dépendance et de santé mentale a annoncé l’ouverture de centres spécialisés qui fourniront des soins involontaires⁠2.

Les « atomes crochus » de John Rustad et de Pierre Poilievre

Au Parti conservateur, on s’est frotté les mains en voyant le dirigeant virer capot. Le chef John Rustad, il faut le préciser, est climatosceptique. La taxe sur le carbone, a-t-il affirmé dernièrement au micro du psychologue Jordan Peterson, est « une vaine tentative de changer la météo ».

À ce chapitre, il est « tellement éloigné des valeurs de la majorité des gens en Colombie-Britannique », estime Karin Kirkpatrick. Et de façon générale, « Pierre Poilievre a l’air d’un centriste comparativement à John Rustad », laisse tomber Murray Rankin, qui a siégé à Ottawa entre 2012 et 2019.

Je pense que c’est la question fondamentale de l’élection : qui est le Parti conservateur, quels principes défend-il réellement ?

 Stewart Prest, politologue à l’Université de la Colombie-Britannique

Selon lui, la formation va faire campagne en ignorant ou en attaquant les médias — les demandes d’entrevue de La Presse ont d’ailleurs été ignorées par le parti, dont l’attaché de presse était porte-parole de Pierre Poilievre pendant sa course à la chefferie.

Le Britanno-Colombien profite d’ailleurs grandement de la popularité de son homologue au fédéral, analyse Murray Rankin.

Pierre Poilievre est la seule raison pour laquelle il est en aussi bonne posture, parce que Pierre Poilievre jouit d’un énorme appui dans les régions rurales de la province. » Et le leader de l’opposition officielle à Ottawa serait ravi de travailler avec un (autre) gouvernement conservateur s’il est élu.

À la recherche de l’option centriste

Le Parti conservateur a accepté parmi ses candidats au moins trois élus sortants de BC United.

Avant tous ces chambardements, Karin Kirkpatrick avait décidé de quitter la vie politique. Elle a finalement décidé de solliciter un autre mandat dans sa circonscription de West Vancouver-Capilano, dans l’espoir d’offrir une option centriste à ses commettants.

Quelques-uns de ses anciens collègues de caucus ont décidé de faire la même chose. « Nous pourrions très bien obtenir la balance du pouvoir si un gouvernement minoritaire est élu, ou si les résultats sont très serrés, expose-t-elle. Cela permettrait d’avoir une influence significative au sein du gouvernement. »

La balance du pouvoir, on connaît en Colombie-Britannique : en 2017, aucun parti n’avait réussi à obtenir une majorité de sièges. Les 3 verts et les 41 néo-démocrates avaient toutefois scellé une entente qui avait mis fin à 16 ans de règne libéral.

Source: la presse

Derniers articles
Les cookies nous permettent de personnaliser le contenu et les annonces, d'offrir des fonctionnalités relatives aux médias sociaux et d'analyser notre trafic. Nous partageons également des informations sur l'utilisation de notre site avec nos partenaires de médias sociaux, de publicité et d'analyse.
j'accepte!