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Au moins neuf personnes ont été blessées, dont une grièvement, lors d’affrontements entre des participants à un festival de la communauté érythréenne et des manifestants, érythréens eux-mêmes, samedi dans l’ouest de Toronto. La police a été appelée en matinée au sujet d’une personne armée d’un couteau, d’affrontements et de tentes en feu dans le secteur du parc Earlscourt.
La police de la ville a finalement déployé l’escouade antiémeute au parc où le Festival Eritrea a sombré dans le chaos presque dès le départ. Les premières échauffourées ont éclaté vers 10 h et les tensions se sont poursuivies tout au long de la journée.
Des personnes se sont munies de bâtons, tandis que des manifestants ont scandé slogans tels que Festival de la honte
, selon ce qu’a constaté Radio-Canada sur place.
Les ambulanciers paramédicaux ont transporté les 9 blessés à l’hôpital, ajoute le Service de police de Toronto (SPT), qui a demandé au public d’éviter les lieux. Il a prévenu que la circulation automobile continuait d’être fortement perturbée dans les rues alentour samedi après-midi.
Le SPT indique qu’il s’agissait d’une importante manifestation qui aurait dégénéré de façon violente, mais n’a pas identifié le ou les groupes impliqués.
Le festival de la communauté érythréenne qui a lieu annuellement était en cours dans ce parc lorsque les troubles ont commencé.
Des violences ont temporairement recommencé au cours de l’après-midi, selon le SPT. Des agents viennent prêter main-forte afin de gagner le contrôle
, ont déclaré les forces de l’ordre sur leur compte X (anciennement Twitter).
L’Érythrée est décrite par des groupes de défense des droits humains comme l’un des pays les plus répressifs au monde. Depuis qu’elle a obtenu son indépendance de l’Éthiopie, il y a trois décennies, la petite nation de la Corne de l’Afrique est dirigée par le président Isaias Afwerki, qui n’a jamais organisé d’élections. Des millions d’habitants ont fui le pays pour échapper à l’autoritarisme, qui se traduit par exemple par la conscription militaire forcée.
Des manifestants qualifient le festival de politique
Mussa Shehai, qui s’est présenté comme un manifestant et un opposant au régime, a affirmé que le festival a des visées politiques. Il est organisé et parrainé par le consulat d’Érythrée, soutenu par la dictature et ils collectent des fonds pour financer les guerres. Nous nous opposons à ça
, dit-il.
Une autre manifestante, Haregu Asefa, s’est insurgée contre la célébration de l’Érythrée alors que nous avons un dictateur au pouvoir depuis 50 ans, pas de constitution, tout le monde est en prison, pas de parlement du tout
.
Ils organisent un festival chaque année pour collecter de l’argent pour leur propagande. Nous manifestons pacifiquement pour arrêter ce festival qui soutient l’Érythrée.
Par courriel, le consulat d’Érythrée dément être directement lié
au festival.
Joint par téléphone, Lambros Kyriakakos, président de l’organisme organisateur du festival déplore les violences commises samedi. Il est très regrettable que les manifestants aient choisi une voie qui n’aide pas leur message s’ils ont un vrai message et une préoccupation
, dit-il.
Si quelqu’un veut protester, c’est son droit. Mais frapper et blesser des gens au nom des droits de l’homme, c’est vraiment un oxymore.
Les violences ont été organisées et commises par la Brigade de la mort
, selon M. Kyriakakos, un groupe qui s’oppose au gouvernement érythréen et à tout événement soutenu par le gouvernement érythréen dans la diaspora
. Ce groupe, aussi appelé Brigade N’hamedu, se serait formé au cours des six derniers mois
et causerait des troubles à l’échelle mondiale, avance M. Kyriakakos.
Il s’agit plutôt d’un festival qui célèbre simplement la culture érythréenne, estime Rora Asgodom, une participante au festival. Elle critique l’ignorance
des manifestants.
Ils s’opposent au gouvernement [érythréen] et leur choix de façon de gérer ça est d’annuler tout ce qui montre du patriotisme envers le pays
, dit-elle.
Nous sommes un mélange d’horizons différents dans le pays, d’idéologies différentes, de points de vue différents. Mais ils partent du principe que si quelqu’un est fier d’être originaire d’Érythrée, il soutient tout ce à quoi ils s’opposent et ils pensent que la violence sera la solution.
Par courriel, une porte-parole de la Ville de Toronto indique qu’elle ne délivre pas de permis pour les manifestations ou les rassemblements. La Ville n’ignore ni ne tolère aucune forme de violence
, souligne Jaclyn Carlisle.
Dans un message sur les réseaux sociaux, la conseillère municipale dans le quartier Davenport, Alejandra Bravo, se dit choquée et attristée
d’entendre que de la violence a éclaté lors d’une manifestation politique contre un festival dans le parc Earlscourt.
Elle ajoute que le nombre de victimes et l’étendue de leurs blessures ne sont pas encore connus et que son bureau continuera à fournir des mises à jour dès qu’elles seront disponibles.
D’autres célébrations érythréennes marquées par la violence
Ce n’est pas le premier festival érythréen qui dégénère. Vendredi, 50 personnes ont été blessées dans un festival semblable en Suède.
En Allemagne, 22 policiers avaient été blessés le mois dernier, notamment par des jets de pierres.
Le festival érythréen continuera dimanche et lundi comme prévu, assure le président de la Coalition Lambros Kyriakakos. Une pétition en ligne publiée au nom de la Brigade N’hamedu demande à l’hôtel Sheraton Centre Toronto de ne pas accueillir l’événement du festival prévu dimanche soir. Elle a récolté près de 1600 signatures en date de samedi à 20 h.
Source: Radio Canada