Assahafa.com
C’est un vieux différend d’un demi-milliard de dollars qui ne contribuera pas à réchauffer les relations Québec-Ottawa. Radio-Canada a appris qu’un dossier d’indemnisation pour des dépenses reliées à la crise du verglas de 1998, qu’on croyait clos, est toujours actif et que le gouvernement Legault n’a pas abandonné sa demande, 25 ans après les événements.
Sous le gouvernement libéral de Jean Charest, le Québec avait semblé faire une croix sur tout espoir de récupérer cet argent. Or, un document signé en 2022 par le Secrétariat aux relations canadiennes, que nous avons consulté, indique que la revendication financière envers le gouvernement fédéral
est toujours d’actualité.
Le dossier de réclamations financières relatif à la crise du verglas ne peut être considéré comme clos
, nous a confirmé le Conseil exécutif, le ministère du premier ministre François Legault, quelques minutes après sa rencontre du 20 décembre avec Justin Trudeau.
Ce programme des Accords d’aide financière en cas de catastrophe (AAFCC) vise à reconstruire des maisons endommagées, maintenir en vie des petites entreprises ou des exploitations agricoles, ainsi que réparer, reconstruire et restaurer les services publics et les services communautaires essentiels, à leurs capacités d’avant la catastrophe
.
Le gouvernement fédéral a, jusqu’ici, toujours refusé les demandes de compensation de la province, considérant que les dépenses d’Hydro-Québec ne sont pas admissibles aux AAFCC et que les 63 millions de dollars de dépenses en santé et services sociaux n’avaient pas de pièces justificatives.
Mais Québec n’est pas de cet avis. Le gouvernement juge qu’il a le droit d’obtenir ces compensations en vertu du programme fédéral.
« Dans tous les dossiers de réclamations financières à l’égard du gouvernement fédéral, le Québec ne vise qu’à obtenir son dû et à être traité équitablement. »
Il faut respecter les paramètres des termes et conditions du programme
, répond la porte-parole de Sécurité publique Canada, Kirsti MacKenzie. Elle rappelle que seules les sociétés d’État fournissant des services d’eau et d’évacuation des eaux usées sont couvertes par les AAFCC.
« Les sociétés d’État […] disposent généralement de ressources suffisantes et/ou d’un accès à une couverture d’assurance complète pour couvrir les coûts des dommages et continuer à fonctionner. »
En 2011, 13 ans après la crise du verglas, le gouvernement fédéral avait déjà versé 525 millions de dollars au Québec, mais les 484 millions encore réclamés n’entraient pas dans ce total.
Une des catastrophes les plus coûteuses de l’histoire du Canada
Selon le Conference Board du Canada, la catastrophe a occasionné des pertes de 1,6 milliard de dollars pour l’économie canadienne. Au total, Hydro-Québec a dû investir 2 milliards pour renforcer son réseau de transport d’électricité.
Du 5 au 10 janvier 1998, 100 mm de pluie verglaçante s’étaient abattus sur le sud-ouest du Québec. Des pylônes que l’on croyait indestructibles s’étaient écroulés. Quelque 3000 kilomètres de lignes électriques d’Hydro-Québec étaient tombés, plongeant dans le noir la moitié de la province.
Les fils électriques alourdis par la glace pendaient à quelques mètres du sol, bloquant le passage des véhicules d’urgence. Quelque 100 000 personnes avaient été évacuées de chez elles. Environ 15 000 soldats avaient été déployés dans les différentes zones sinistrées.
Québec affirme que le gouvernement fédéral de Stephen Harper avait montré de l’ouverture à s’entendre avec la province pour la dédommager, mais Ottawa avait finalement reculé concernant les dommages subis par Hydro-Québec.
63 millions $ dépensés par Québec sans pièces justificatives
Le gouvernement fédéral refuse aussi de reconnaître des réclamations financières totalisant 63 millions de dollars pour des dépenses engagées par le ministère de la Santé et des Services sociaux, sous prétexte qu’elles ne sont pas accompagnées des factures originales
.
Québec confirme ne pas avoir de pièces justificatives directes, mais assure que les montants sont présents dans le système comptable officiel du gouvernement et que le Contrôleur des finances a assuré de la fiabilité des données.
Hydro-Québec a reçu des remboursements de la province jusqu’en 2019
Sans attendre la confirmation d’une éventuelle compensation d’Ottawa, le gouvernement du Québec s’était engagé à verser à Hydro-Québec l’équivalent de la valeur nette des équipements détruits au moment du sinistre (235 millions de dollars) et à rembourser des dépenses maximales de 200 millions reliées aux mesures d’urgence (199 millions), le tout en dollars de 1998.
L’aide gouvernementale s’élève à 434 millions de dollars en 1998
, écrit une porte-parole de la société d’État, Caroline Des Rosiers, en réponse aux questions de Radio-Canada. Les remboursements du gouvernement du Québec à Hydro-Québec à ce titre se sont terminés en 2019.
En dollars d’aujourd’hui, la réclamation du Québec envers Ottawa équivaudrait à environ 800 millions de dollars, mais la province n’a pas demandé à ce qu’on tienne compte de l’inflation.
Source: Radio-Canada