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Le premier ministre Mark Carney réunit lundi ses homologues des provinces et des territoires à Saskatoon pour discuter de grands projets d’infrastructures d’envergure nationale en vue de stimuler l’économie canadienne face aux menaces commerciales de plus en plus pressantes des États-Unis.
Les premiers ministres des treize provinces et territoires sont arrivés avec les valises remplies de suggestions – mines, lignes électriques, ports et oléoducs pétroliers – et espèrent que leurs projets seront retenus par Ottawa, qui promet un examen accéléré au moyen d’une mesure législative qui assouplirait certains critères environnementaux.
C’est Mark Carney qui nous a invités ici, il nous a demandé d’arriver avec des projets, donc on arrive avec beaucoup de projets
, a lancé le premier ministre du Québec François Legault aux journalistes lors de son arrivée à Saskatoon. Il y a [des projets] en électricité, il y en a en minéraux critiques. Maintenant, quelle sera la contribution du gouvernement fédéral? On va apprendre ça aujourd’hui.
Il y a beaucoup à offrir, maintenant on va attendre de savoir exactement ce que Carney a en tête comme contribution et comme grands projets.
M. Legault a déjà exprimé son souhait que le gouvernement fédéral paie la ligne de transport qui raccordera les nouveaux projets hydroélectriques du Québec et de Terre-Neuve-et-Labrador, sur le fleuve Churchill. Il s’agit d’un projet estimé entre 2 et 3 milliards de dollars, selon une source à Hydro-Québec.
Au total, le Québec souhaite qu’Ottawa finance des projets dans la province pour un montant d’environ 22 milliards de dollars sur 10 ans.
La guerre commerciale, une opportunité
La réunion des premiers ministres intervient alors que l’administration américaine de Donald Trump vient de doubler ses droits de douane sur les importations d’acier et d’aluminium, passant de 25 % à 50 %. Il s’agit de deux secteurs névralgiques pour l’économie du Canada, et surtout pour le Québec.
M. Carney, qui a fait de l’économie son cheval de bataille durant la campagne électorale, promet de faire face aux menaces américaines en éliminant les barrières commerciales entre les provinces, en accélérant la construction de projets d’infrastructures de grande envergure, en faisant du Canada une superpuissance énergétique
et en diversifiant ses marchés commerciaux, notamment en s’ouvrant à l’Europe et à l’Asie.
Lundi, à l’ouverture de la réunion, il a réaffirmé ces objectifs.
Les semaines et les mois à venir seront déterminants pour concrétiser l’élan que vous avez créé autour de cette table et que le gouvernement fédéral souhaite amplifier pour traduire ces idées en actions concrètes.
Plusieurs des premiers ministres provinciaux qui se sont exprimés avant la rencontre, lundi, ont affirmé que la guerre commerciale avec les États-Unis pourrait représenter une opportunité
pour l’économie canadienne.
C’est ce que pense notamment François Legault, qui arrive à la rencontre avec plusieurs projets en lien notamment avec les minéraux critiques. Il y a une opportunité de remplacer les Chinois pour approvisionner éventuellement les Américains
, a-t-il dit. Donc c’est une belle opportunité pour le Canada dans cette bataille avec M. Trump d’avoir quelque chose à offrir.
M. Legault a affirmé qu’il existe une dizaine de projets en lien avec les minéraux critiques et stratégiques au Québec.
Les oléoducs, une nécessité, selon Ford
Son homologue ontarien, Doug Ford, pense lui aussi qu’une opportunité
se présente au Canada, notamment pour la construction de nouveaux oléoducs pétroliers reliant l’ouest à l’est du pays. Un souhait que partagent d’ailleurs plusieurs provinces de l’Ouest, Alberta en tête.
Nous sommes unis et nous allons apporter de réels changements positifs
, a-t-il assuré avant la réunion.
Nous n’allons plus attendre des années et des années pour lancer des projets à travers le pays, qu’il s’agisse de minéraux critiques ou d’oléoducs pétroliers. […] Nous allons devenir une superpuissance énergétique dans le monde entier.
Selon M. Ford, la construction de nouveaux oléoducs est nécessaire pour diversifier les marchés du Canada et sortir de la dépendance du pays envers les États-Unis, qui importent la majeure partie de la production pétrolière des provinces de l’Ouest.
Il a aussi mentionné vouloir mettre de l’avant durant la rencontre l’exploitation minière dans le Cercle de feu de l’Ontario
, une région située à environ 500 kilomètres au nord de Thunder Bay, qui renferme d’énormes gisements de minéraux essentiels.
Un appétit croissant pour les oléoducs
, selon Smith
La première ministre de l’Alberta, Danielle Smith, qui a fait de la question des oléoducs un enjeu d’unité nationale, allant jusqu’à brandir le spectre d’une éventuelle séparation de la province du reste du Canada, s’est montrée optimiste lundi, avant la réunion.
Il semble y avoir un appétit croissant pour la construction d’oléoducs pour acheminer le pétrole et le gaz vers d’autres marchés
, a-t-elle dit aux journalistes. Si nous ne nous attaquons pas aux politiques terribles qui ont porté atteinte à la confiance des investisseurs, nous n’arriverons pas à convaincre les promoteurs de se manifester
, a-t-elle toutefois ajouté, en référence aux politiques environnementales en place.
Le pétrole est l’exportation la plus précieuse pour le Canada. […] Il y a des réserves inexploitées d’une valeur de 9000 milliards de dollars qui peuvent être découvertes dès maintenant. Pourquoi laisseriez-vous cela dans le sol? Aucun autre pays au monde ne le ferait et nous ne devrions pas le faire non plus.
J’ai hâte de travailler avec le premier ministre [Carney] pour voir à quel point on peut avancer rapidement avec ces projets
, a-t-elle encore dit.
Signe de l’ouverture de Mark Carney envers les demandes de l’Ouest, c’est la première fois en 40 ans qu’une réunion regroupant les provinces et les territoires est organisée en Saskatchewan.
Susan Holt, la première ministre du Nouveau-Brunswick, s’est elle aussi montrée optimiste, se disant en faveur de la construction de nouveaux oléoducs pour relier l’ouest à l’est du pays.
On veut que les ressources canadiennes soient partagées à travers le pays
, a-t-elle dit avant le début de la rencontre. Nous avons ce que le monde veut et ce dont le pays a besoin
, évoquant des infrastructures qui existent déjà dans sa province pour exporter le pétrole, dont les ports de Belledune et de Saint-Jean.
François Legault s’est, quant à lui, montré plus prudent en évoquant l’idée qu’un nouvel oléoduc pétrolier passe par le Québec, affirmant que son gouvernement étudierait toute proposition en analysant les retombées économiques, mais aussi l’impact environnemental d’un tel projet.
M. Legault s’est récemment dit ouvert à discuter d’un projet d’oléoduc qui traverserait le Québec, après avoir qualifié en 2018 le pétrole albertain d’énergie sale. Il a même récemment soulevé la possibilité d’un pipeline qui passerait par le nord de la province pour déboucher à Sept-Îles, sur la Côte-Nord.
Le premier ministre Carney devrait tenir un point de presse à la fin de la réunion, lundi, en début de soirée.
Source: Radio Canada