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Le Canada s’est engagé à augmenter ses dépenses de défense, mais s’interroge sur le « calendrier » pour atteindre un nouvel objectif de dépenses plus élevé de l’OTAN, a déclaré mardi la ministre des Affaires étrangères, Anita Anand.
Mme Anand est présente à La Haye avec le premier ministre Mark Carney pour les réunions de mardi et mercredi, au cours desquelles les dirigeants de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN) devraient décider de relever ou non l’objectif de dépenses des membres de l’alliance de 2 % à 5 % du produit intérieur brut (PIB).
Interrogée sur l’acceptation de cette proposition par le Canada, Mme Anand a affirmé que son pays avait toujours soutenu les objectifs de dépenses de l’OTAN.
La véritable question est le calendrier
, a-t-elle dit aux journalistes à La Haye.
Elle a ajouté que certains alliés ont proposé une échéance de 2029 pour atteindre cet objectif.
Nous aimerions voir des étapes en cours de route permettant de réexaminer si cette approche, en augmentant à ce rythme les dépenses nationales, est la bonne.
Lors d’une conférence téléphonique avec des journalistes à Ottawa mardi, Mme Anand a déclaré qu’il serait imprudent
de discuter publiquement de la position du Canada avant que les dirigeants de l’OTAN n’en discutent à la table de négociation, mais elle a ajouté que des questions subsistaient quant à la flexibilité de la demande de 5 %.
Toute nouvelle directive en matière de dépenses doit être adoptée à l’unanimité des 32 États membres de l’OTAN, et aucun membre n’est actuellement proche de cet objectif.
Avec 3,38 %, les dépenses de défense des États-Unis en pourcentage du PIB étaient les plus élevées de l’alliance en 2024.
Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, et le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, ont tous deux dit s’attendre à ce que les membres de l’alliance s’engagent à atteindre un nouvel objectif de 5 % du PIB consacré à la défense, en hausse par rapport à 2 % actuellement.
Cependant, le président américain Donald Trump a déclaré que ce chiffre ne devrait pas s’appliquer aux États-Unis, mais uniquement à leurs alliés.
Le Royaume-Uni, la France, les Pays-Bas et l’Allemagne se sont tous trois engagés à atteindre l’objectif de 5 %. Les pays de l’OTAN les plus proches des frontières de l’Ukraine, de la Russie et de son allié bélarusse se sont également engagés à le faire.
Un plan qui ne fait pas l’unanimité
Mais tout le monde n’est pas encore d’accord. Le premier ministre espagnol Pedro Sánchez a déclaré dimanche que l’Espagne avait conclu un accord avec l’OTAN pour être exclue du nouvel objectif de dépenses. Comme le Canada, l’Espagne peine depuis longtemps à atteindre l’objectif de 2 % et a rejeté la nouvelle proposition.
Mardi, le premier ministre slovaque Robert Fico a suggéré que son pays aurait intérêt à adopter la neutralité. Il a également publié une déclaration affirmant que le nouvel objectif est totalement absurde
.
M. Rutte a averti lundi qu’aucun pays ne pouvait se soustraire à cet objectif et que les progrès réalisés vers le nouvel objectif seraient évalués dans quatre ans.
Le plan que M. Rutte devrait présenter lors du sommet prévoit une certaine marge de manœuvre pour aider les alliés à atteindre ce chiffre élevé.
Il engagerait les membres à consacrer 3,5 % de leur PIB annuel aux besoins essentiels en matière de défense, tels que les avions et autres armes, et 1,5 % aux domaines connexes, tels que les infrastructures, la cybersécurité et l’industrie.
L’OTAN a fixé l’objectif actuel de 2 % en 2014 et, cette année, pour la première fois, les 32 pays membres devraient l’atteindre. En 2014, lorsque l’objectif actuel de 2 % a été fixé, seuls trois membres de l’OTAN l’ont atteint : les États-Unis, le Royaume-Uni et la Grèce.
Le Canada à la traîne
Les dépenses de défense du Canada n’ont pas atteint 5 % du PIB depuis les années 1950. L’OTAN estime que le Canada a dépensé 41 milliards $ en 2024 pour la défense, soit 1,37 % du PIB. En 2014, le Canada y a consacré 20,1 milliards $, soit 1,01 % du PIB.
L’an dernier, le Canada a déclaré qu’il serait en mesure d’atteindre 2 % d’ici 2032, mais M. Carney a dit plus tôt ce mois-ci que ce serait le cas cette année.
Lundi à Bruxelles, il a également annoncé que le Canada avait officiellement signé un nouveau pacte de défense et de sécurité avec l’Union européenne (UE), ouvrant la voie à des accords d’approvisionnement en matière de défense entre le Canada et les pays européens.
Mme Anand a déclaré que ce nouveau partenariat élargirait la base industrielle de défense du Canada.
Questionnée sur ses inquiétudes concernant les précédents commentaires désobligeants du président Trump à l’égard de l’OTAN, Mme Anand a indiqué que M. Trump s’engageait avec l’OTAN de manière significative
.
Plus tôt cette année, le président Trump a suggéré que les États-Unis pourraient abandonner leurs engagements envers l’alliance si les pays membres n’atteignaient pas leurs objectifs de dépenses de défense.
Un sommet dans un contexte tendu
Les principaux pourparlers à La Haye n’auront lieu que mercredi, des réunions principalement bilatérales étant prévues mardi, ainsi qu’un souper des dirigeants.
Le premier ministre Carney a rencontré mardi les dirigeants de la Lettonie, des Pays-Bas et des pays nordiques, cette dernière rencontre étant consacrée à l’Arctique et à la sécurité transatlantique.
M. Carney a également été reçu par le roi Willem-Alexander et la reine Máxima des Pays-Bas.
Jan Techau, chercheur principal au sein du programme de défense et de sécurité transatlantique du Centre d’analyse des politiques européennes, a expliqué que le niveau global d’ambition de l’Europe en matière de défense avait massivement
augmenté ces dernières années en réponse à l’agression russe.
Plus on est proche de la Russie, plus on est ambitieux
, a-t-il indiqué.
Lauren Speranza, une autre chercheuse au Centre d’analyse des politiques européennes, a déclaré que le sommet de l’OTAN se tenait à un moment très précaire
, marqué par l’incertitude quant à l’engagement des États-Unis envers l’Europe, le conflit acharné entre la Russie et l’Ukraine et les tensions persistantes autour du commerce transatlantique.
M. Rutte a insisté sur le fait que l’Ukraine demeure un enjeu vital pour l’OTAN, malgré le fait qu’elle soit éclipsée cette année par de nouvelles guerres au Moyen-Orient et le débat sur l’objectif de dépenses de défense.
Le président ukrainien Volodymyr Zelensky est à La Haye pour des réunions, mais il n’assistera pas à la réunion des dirigeants de mercredi.
Lors de sa rencontre avec M. Rutte et de hauts responsables de l’UE, le président Zelensky a appelé à des investissements européens dans l’industrie de la défense ukrainienne. M. Zelensky a dit cette semaine à Sky News que le président russe Vladimir Poutine pourrait attaquer un pays de l’OTAN d’ici cinq ans.
Les tensions au Moyen-Orient sont également au cœur de la réunion des dirigeants de l’OTAN, dont le sommet débute mardi avec l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran.
M. Carney a affirmé mardi sur les réseaux sociaux que le Canada saluait l’annonce d’un cessez-le-feu entre Israël et l’Iran.
Comme on rapporte la diminution de la capacité nucléaire de l’Iran, nous exhortons les parties à adhérer au cessez-le-feu, à reprendre le dialogue et à négocier une solution diplomatique
, a-t-il écrit.
Cette solution devrait mener à une désescalade générale des hostilités au Moyen-Orient, notamment à un cessez-le-feu dans la bande de Gaza.
Source: Radio Canada