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Face au refus de Québec de revoir le cœur de sa réforme du régime forestier, les Premières Nations claquent la porte de la table de concertation mise sur pied dans l’espoir de rapprocher les deux parties.
Cette décision reflète notre position ferme : sans reconnaissance concrète de nos droits et sans volonté réelle de coconstruction, il s’agit d’une démarche que nous ne pouvons pas cautionner », a déclaré l’Assemblée des Premières Nations Québec-Labrador (APNQL) dans une lettre publiée mardi.
Cette table de concertation dite « de haut lieu » avait été mise en place à la suite des consultations parlementaires sur le projet de loi 97.
Présentée par la ministre des Ressources naturelles et des Forêts, Maïté Blanchette Vézina, en avril dernier, la pièce législative vise à réformer la façon dont sont gérées les forêts au Québec.
L’APNQL, qui représente les 43 communautés autochtones des deux provinces dont elle porte le nom, avait alors dénoncé un « acte de dépossession de nos terres ».
C’est que le projet de loi introduit la notion de triade, qui promet 30 % de la forêt québécoise à l’industrie afin de rendre cette part plus productive tout en épargnant le reste du territoire.
Les Premières Nations exigeaient toutefois le « retrait complet » du projet de loi de ce concept de zonage prioritaire, qu’elles jugent « incompatible » avec leurs droits.
Refus de dialogue
L’APNQL réclamait du même coup le respect des droits ancestraux et ceux issus de traités, tout comme la mise en place d’une « véritable cogestion des forêts, de gouvernements à gouvernement ».
Ces conditions représentaient « les conditions minimales de conformité au droit, et les fondations indispensables d’un processus crédible », selon elle.
Or, Québec lui aurait opposé une fin de non-recevoir, notamment sur le concept de triade. « Ce refus de dialogue sur un enjeu aussi central révèle de manière flagrante une absence de volonté politique réelle d’ouvrir la voie à la collaboration », dénonce l’APNQL.
Ce refus n’est toutefois pas nouveau en soi. En juin, le ministre responsable des Relations avec les Premières Nations et les Inuit, Ian Lafrenière, avait promis des « amendements importants » au projet de loi.
Mais il avait rapidement été recadré par le premier ministre, François Legault, qui disait alors qu’il « n’y a pas de grands changements qui, pour l’instant, sont prévus, mais des ajustements ».
Le cabinet de la ministre Maïté Blanchette Vézina a affirmé lundi vouloir « poursuivre le travail de bonne foi » et invitant l’APNQL à revenir à la table des discussions.
« L’APNQL a déposé plusieurs demandes et nous avons également soumis plusieurs propositions concrètes à l’APNQL et à l’ensemble des communautés afin de bonifier le PL97, poursuit-on. Nous souhaitons continuer les discussions afin de travailler ensemble au développement durable de la forêt et pour assurer des retombées économiques pour toutes les communautés. »
D’autres blocus ?
Reste que le retrait de l’APNQL des discussions fait monter la tension d’un cran.
Ça n’a pas été une décision prise à la légère. Nous avons été à la table avec une réelle volonté de coconstruire, mais on ne peut pas rester assis à une table qui ne mène nulle part.
Sipi Flamand, chef du Conseil des Atikamekw de Manawan
L’APNQL attendra de voir si le gouvernement Legault réagira en apportant des modifications à son projet de loi, mais on s’attend déjà à devoir mener une campagne pour convaincre les Québécois de s’unir contre cette réforme.
« Il y a un dialogue qu’il faut faire, mais il faut le faire avec les Québécois, pour qu’il y ait des changements sociaux », mentionne le chef Sipi Flamand.
Déjà, des blocus forestiers ont lieu sur le territoire, y compris au Lac-Saint-Jean, mais le chef atikamekw n’encourage pas pour autant ce genre de manifestations, du moins, pas pour l’instant. « On n’est pas rendu là », dit-il.
Source: la presse