Découvrabilité : Québec imposera des quotas aux géants comme Netflix

21 mai 2025
Découvrabilité : Québec imposera des quotas aux géants comme Netflix

Assahafa.com

Les millions de Québécois abonnés aux plateformes Netflix, Spotify, Apple et autres Disney+ pourraient bientôt y trouver plus facilement des contenus locaux. En préparation depuis deux ans, le projet de loi assurant la découvrabilité des produits francophones sur les grandes plateformes numériques sera finalement déposé aujourd’hui par le ministre de la Culture et des Communications, Mathieu Lacombe.

En entrevue à Radio-Canada, le ministre estime que le moment est venu de légiférer devant l’hégémonie des géants du numérique et la difficulté pour le contenu québécois d’y faire sa place.

Chaque année au Québec, si vous prenez toute la musique qui est écoutée, 8,5 % est en français. […] C’est très, très peu. Si vous prenez seulement la musique québécoise, on est à 5 %. C’est encore pire!, déplore Mathieu Lacombe dans son bureau de l’Assemblée nationale.

Pour le gouvernement caquiste, protéger le français veut aussi dire que les Québécois doivent avoir accès facilement à de la musique, des films ou des séries francophones dès qu’ils ouvrent ces plateformes.

Ce qu’on appelle la découvrabilité, c’est d’être capable de tomber sur quelque chose, de le découvrir alors qu’on ne le cherchait pas proactivement, explique le ministre.

S’il ne peut pas donner tous les détails de son projet de loi sans commettre d’outrage au Parlement, le ministre indique clairement que le Québec imposera des quotas de visibilité pour les contenus francophones sur les grandes plateformes, majoritairement américaines.

À terme, l’objectif, c’est qu’il y ait un quota à respecter pour les entreprises. […] C’est la première fois que le Québec va légiférer dans ce domaine. Donc, pour nous, c’est nécessaire de se donner le pouvoir, déclare-t-il.

Le ministre laisse aussi entendre que la Charte québécoise des droits et libertés pourrait être amendée pour y inclure le droit d’avoir accès à la culture, une avenue intéressante selon lui.

Cette recommandation avait été faite par le groupe d’experts mandatés par le ministre pour lui faire des suggestions sur la découvrabilité. Ce même groupe, composé notamment de l’ancienne ministre Louise Beaudoin et du constitutionnaliste Patrick Taillon, suggérait aussi l’an dernier dans son rapport que l’imposition de quotas soit envisagée.

Ce dont j’ai envie, c’est que lorsqu’on ouvre une plateforme comme Netflix, on sente qu’on arrive au Québec. Après, les gens sont libres de consommer ce qu’ils souhaitent. Films, séries d’ici ou d’ailleurs, le choix leur appartient, mais il semble que c’est le fun, quand on ouvre une plateforme comme celle-là, de sentir qu’on arrive chez nous.

Une citation deMathieu Lacombe, ministre de la Culture et des Communications

Le Québec peut-il forcer la main des géants américains? Même s’il s’agit de son propre aveu de droit nouveau, le ministre assure qu’après un travail intensif des juristes de l’État, le Québec peut imposer sa loi. D’autres juridictions l’ont fait aussi, souligne-t-il.

Il y a des États à l’intérieur de l’Union européenne qui ont légiféré, et on ne parle pas toujours d’États aussi populeux que la France, et là-bas ça fonctionne. Pourquoi, si ça fonctionne en Europe, ça ne pourrait pas fonctionner au Québec?, se demande-t-il.

Le ministre ajoute du même souffle que sa loi aura du mordant et des sanctions et pénalités seront imposées aux géants numériques s’ils ne s’y conforment pas.

Précisons que le projet de loi va aussi s’appliquer aux plateformes canadiennes comme Illico, Crave et Tou.tv. (nouvelle fenêtre)

Une bataille dans la guerre commerciale avec Donald Trump?

Le ministre Lacombe assure que son projet de loi respecte les termes de l’ACEUM, mais il reconnaît que dans le contexte tendu actuel, il existe un risque que l’administration Trump voie dans ses intentions une façon de brouiller davantage les relations commerciales.

En cas de contestation de la loi par les Américains, le Québec a l’intention d’invoquer l’exception qui soustrait les biens culturels aux accords commerciaux.

On ne doit surtout pas craindre la réaction des États-Unis et s’empêcher d’agir. Si on fait ça, on va directement en contradiction avec le principe d’exception culturelle [dans les accords commerciaux]. À quoi elle sert si on ne l’utilise pas?, soulève le ministre, qui rappelle que l’administration Biden était elle aussi opposée à l’exception culturelle.

Après deux ans de préparation, de consultations et d’avis juridiques, Mathieu Lacombe dit vouloir laisser à d’autres le soin de faire son bilan, mais il admet que le document qu’il déposera aujourd’hui au Salon rouge revêt une importance particulière.

C’est sûr que c’est le plus gros projet de loi de mon mandat. C’est quelque chose que je souhaitais faire depuis mon entrée en poste, admet-il.

Avec son projet de loi, le ministre estime qu’il aura fait la démonstration que même le Québec peut tenir tête aux grands joueurs numériques. Au départ, je pense que plusieurs me voyaient comme un ministre jeune, naïf, qui pensait pouvoir encadrer les géants. Depuis ce temps-là, on a fait la démonstration qu’on a la capacité d’agir, et on agit, dit-il.

Source: Radio Canada

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