Comprendre,Les protocoles d’entente sont-ils une arme efficace face à la guerre tarifaire?

5 août 2025
Comprendre,Les protocoles d’entente sont-ils une arme efficace face à la guerre tarifaire?

Assahafa.com

Dans le contexte de la guerre tarifaire avec les États-Unis, les protocoles d’entente semblent être une tendance partout au pays. Et depuis le début de l’année 2025, le gouvernement fédéral et les différentes provinces adoptent un discours d’unité nationale.

Par l’intermédiaire de la Fédération canadienne, les provinces multiplient les efforts afin de faire tomber les barrières commerciales interprovinciales.

Selon Renaud Brossard, vice-président aux communications de l’Institut économique de Montréal (IEDM), les protocoles d’entente commerciaux ont un clair momentum depuis février.

Dans les dernières semaines seulement, l’Île-du-Prince-Édouard et le Nouveau-Brunswick se sont mis d’accord pour faciliter le commerce interprovincial, tout comme les trois territoires canadiens. Un protocole d’entente a également été signé entre l’Alberta, l’Ontario et la Saskatchewan, dans le but de construire de nouveaux oléoducs, des voies ferrées et d’autres infrastructures énergétiques et commerciales.

Qu’est-ce qu’un protocole d’entente?

C’est comme une expression d’intérêt, d’un intérêt probablement réel, mais avant qu’il y ait des projets concrets, il reste plusieurs étapes politiques à franchir, indique le professeur de sciences politiques à l’Université de l’Alberta Frédéric Boily.

En clair, un protocole d’entente exprime une volonté de s’entendre sans toutefois être légalement contraignant. Il sert plutôt de base sur laquelle une entente sera négociée.

Il faut voir ça comme une première soumission qui est faite par un contractant pour faire les rénovations chez soi.

Dans le cas du protocole d’entente signé entre l’Alberta, l’Ontario et la Saskatchewan sur la construction d’infrastructures énergétiques, les dirigeants des trois provinces se sont entendus sur la volonté de mener à terme ces projets.

Toutefois, sans l’accord du fédéral, aucun chantier ne peut être entamé comme stipulé dans le protocole, lequel sert donc ici plutôt de moyen de pression à l’endroit du gouvernement fédéral pour mener à l’approbation des projets sur lesquels on s’est entendu.

Pourquoi les protocoles d’entente ont-ils la cote?

Au cours du mois de juillet, la Saskatchewan à elle seule a signé quatre protocoles d’entente de commerce interprovincial. À titre comparatif, la Saskatchewan en avait signé seulement deux de janvier à juillet l’an dernier, selon le site web du gouvernement provincial.

Le Manitoba a également signé quatre protocoles d’entente avec la Saskatchewan, la Colombie-Britannique, le Nouveau-Brunswick et l’Île-du-Prince-Édouard pour améliorer les échanges commerciaux et la mobilité de main-d’œuvre.

De l’avis de Renaud Brossard, il n’est pas étonnant de voir autant d’ententes signées entre les provinces canadiennes.

D’après une étude menée par l’IEDM, si l’ensemble du pays faisait tomber ces barrières commerciales, l’économie canadienne serait environ 215 milliards de dollars plus forte chaque année. Une diminution des prix partout au pays serait également observée, tout comme des augmentations de salaire, d’après l’Institut.

En comparaison, selon Statistique Canada, le commerce Canada-États-Unis représente chaque année près de 1000 milliards de dollars.

Il ajoute que le commerce interprovincial est également plus facile pour les petites entreprises qui ne peuvent diversifier leurs exportations vers l’international et qui se voient bloquées par les tarifs américains en raison de la proximité géographique.

Est-ce vraiment la solution?

Ce scénario pour enrichir l’économie canadienne n’est pas nouveau. Depuis les années 1990, les provinces canadiennes tentent de s’entendre sur la levée des restrictions commerciales, sans succès.

Chaque province veut faire tomber les restrictions, mais on veut que les autres suivent notre modèle, donc on ne s’entend pas, précise l’expert économique Renaud Brossard.

Bien qu’Ottawa ait annoncé l’abolition des 53 dernières restrictions d’ordre fédéral incluses dans l’Accord de libre-échange canadien (nouvelle fenêtre) (ALEC), plusieurs barrières demeurent.

Trois types de barrières au commerce interprovincial

  1. Les barrières codifiées qui représentent des exemptions aux ententes de libre-échange pancanadien dans les différentes provinces, par exemple pour le commerce de l’alcool;

  2. Les barrières professionnelles qui représentent les différences de formations professionnelles nécessaires pour exercer un emploi dans les provinces canadiennes;

  3. Les barrières réglementaires qui représentent les règlements mis en place par les différentes provinces pour uniformiser divers produits.

Toutefois, selon Keith Willoughby, doyen de l’Edwards School of Business de l’Université de la Saskatchewan, des raisons expliquent l’existence de restrictions au commerce.

Je supporte l’idée d’un Canada libre de restrictions, mais pas à n’importe quel prix. On doit toujours s’assurer d’être gagnant dans chaque entente, avertit l’économiste.

La seule entente interprovinciale majeure à travers les années est l’Accord commercial du nouveau partenariat de l’Ouest (NWPTA), signé en 2010 entre la Saskatchewan, l’Alberta et la Colombie-Britannique. Le Manitoba s’y est joint en 2017.

Une analyse du professeur d’économie à l’Université de Calgary, Trevor Tombe, stipule que cette entente a eu pour effet de réduire de 2,3 % les coûts du commerce interprovincial.

Dans cet élan de signatures de collaboration interprovinciale, le premier ministre saskatchewanais Scott Moe a d’ailleurs appelé l’ensemble des provinces canadiennes à joindre le NWPTA à la mi-juillet.

Le professeur de sciences politiques Frédéric Boily rappelle toutefois que même si toutes les provinces canadiennes viennent à faire tomber les restrictions entre elles, la décision finale revient très souvent au gouvernement fédéral.

Source: Radio Canada

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