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À quelque 18 mois de la date prévue des prochaines élections fédérales, tous les partis politiques à Ottawa dressent le même constat : des mesures plus costaudes sont nécessaires afin d’assurer la sécurité des élus de la Chambre des communes.
Ainsi, le Bureau de régie interne – l’organe directeur qui est composé de représentants de tous les partis reconnus à la Chambre des communes – compte annoncer sous peu un train de nouvelles mesures visant à assurer aux élus actuels et à ceux qui songent à briguer les suffrages au prochain scrutin qu’ils pourront faire leur travail en toute sécurité.
Entre autres choses, les députés qui le souhaitent pourront demander une protection policière lors d’évènements auxquels ils participent s’ils le jugent nécessaire ou durant leurs déplacements dans leur circonscription, a appris La Presse. Cette protection pourra être assurée par des agents de la Gendarmerie royale du Canada (GRC), des corps policiers provinciaux comme la Sûreté du Québec ou la Police provinciale de l’Ontario ou encore des corps policiers locaux.
La Chambre des communes entend payer les coûts liés à cette protection policière. Cette mesure est instaurée d’une manière permanente après qu’un projet pilote lancé l’an dernier visant à couvrir les coûts de sécurité lors d’évènements organisés par des députés à l’extérieur de la capitale fédérale s’est révélé concluant.
Autre mesure, les systèmes d’alarme qui ont été installés au cours des dernières années dans les bureaux de circonscription des députés seront uniformisés dans le but de pouvoir signaler plus rapidement les menaces.
On compte aussi augmenter les effectifs affectés au service de veille du web pour les députés afin de détecter les menaces sur les réseaux sociaux comme Facebook et X et même sur le dark web, ont confirmé des sources bien au fait de ce dossier.
« Les mesures qui seront proposées vont améliorer grandement la sécurité pour tous les parlementaires et les ministres. Les budgets liés à la sécurité vont aussi être majorés », a soutenu une source qui a requis l’anonymat parce qu’elle n’était pas autorisée à parler publiquement de ce dossier.
Au cours des derniers mois, des députés de tous les partis politiques ont signalé aux autorités compétentes des incidents qu’ils jugeaient menaçants. Le nombre de cas est d’ailleurs en forte hausse, passant de quelque 300 cas en 2022 à plus de 1500 cas l’an dernier, selon cette même source.
Ces nouvelles mesures s’ajouteront à d’autres qui sont déjà en vigueur depuis quatre ans, notamment l’installation de caméras de surveillance au domicile des élus et la remise d’un avertisseur individuel mobile qui, une fois activé, permet d’alerter un centre de surveillance tiers.
La polarisation des opinions
La pandémie de COVID-19, le « convoi de la liberté » qui a paralysé le centre-ville d’Ottawa pendant trois semaines à l’hiver 2022, la hausse du coût de la vie, le conflit entre Israël et le Hamas et un contexte politique plus polarisé sont autant d’éléments qui expliquent la multiplication des menaces envers les élus fédéraux, provinciaux et municipaux.
Cette semaine, une députée libérale de la région de Toronto, Pam Damoff, a d’ailleurs invoqué la multiplication des menaces envers les élus pour annoncer qu’elle ne serait pas candidate aux prochaines élections fédérales dans une lettre chargée d’émotions adressée à ses commettants.
Les menaces et la misogynie que j’ai vécues en tant que députée de la Chambre des communes sont telles que j’ai souvent peur de sortir en public, et cela n’est pas une façon de vivre en santé et d’une manière soutenable.
Pam Damoff, députée libérale
« Tout simplement, la politique n’est plus pour moi et l’heure est donc venue pour moi de tourner la page sur ce chapitre », a écrit dans sa lettre Mme Damoff, qui a été élue pour la première fois dans la circonscription d’Oakville North–Burlington en 2015.
Le mois dernier, la ministre des Affaires étrangères, Mélanie Joly, a été prise à partie par un homme furieux de la situation humanitaire à Gaza tandis qu’elle marchait sur un trottoir à Montréal. La ministre a tenté d’agripper le téléphone de l’individu qui la filmait et qui lui avait dit notamment que « sa job » était de « la harceler ».
Le cas de Mme Joly est le dernier en lice touchant des ministres du cabinet Trudeau.
Contrairement aux ministres à Québec, qui sont accompagnés par un chauffeur armé jouant le rôle de garde du corps en tout temps, les ministres fédéraux disposent d’un chauffeur qui n’est pas muni d’une arme. Ils se déplacent généralement seuls, tant sur la colline du Parlement que dans leur vie de tous les jours. Mais depuis quelques mois, certains ministres plus en vue du gouvernement libéral se sont vu accorder une protection par des agents de la GRC.
Le gouvernement Trudeau jongle avec l’idée d’imiter le régime de protection des ministres en vigueur au Québec depuis plusieurs années.
L’HISTOIRE JUSQU’ICI
- Octobre 2019 : Justin Trudeau se rend dans un rassemblement partisan à Mississauga muni d’un gilet pare-balles et entouré d’un important dispositif de sécurité, en pleine campagne électorale.
- Novembre 2020 : De nouvelles mesures de sécurité sont offertes aux députés, notamment l’installation de caméras de surveillance à leur domicile. On leur remet aussi un avertisseur individuel mobile.
- Décembre 2021 : Devant la multiplication des menaces, Justin Trudeau demande au ministre de la Sécurité publique de travailler à renforcer la sécurité des ministres et des parlementaires dans la lettre de mandat qu’il lui remet.
- Mai-Juin 2024 : Les députés qui le souhaitent pourront demander une protection policière lors d’évènements auxquels ils participent s’ils le jugent nécessaire
Source: la presse