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Le philosophe Charles Taylor, l’avocat Julius Grey et le cofondateur de la mosquée de Québec, Boufeldja Benabdallah, estiment qu’il faut donner une chance à Amira Elghawaby de remplir son mandat. La nouvelle représentante fédérale de la lutte contre l’islamophobie est au cœur d’une controverse depuis sa nomination il y a une semaine.
Elle a déjà écrit que la « majorité des Québécois » semblaient « influencés par un sentiment antimusulman » dans une chronique publiée dans le quotidien Ottawa Citizen où elle s’opposait à la Loi sur la laïcité de l’État (loi 21). Cette loi interdit le port de signes religieux aux employés de l’État en position d’autorité, y compris les enseignants. Elle est contestée devant les tribunaux.
« Nous sommes sensibles aux préoccupations qui ont été soulevées depuis sa nomination, mais le défi qu’elle doit relever est de taille et nous sommes d’avis qu’il faut donner la chance à Mme Elghawaby d’exercer et de remplir le mandat pour lequel elle a été nommée », écrivent les signataires.
Ils rappellent qu’elle a présenté ses excuses et qu’elle s’est engagée à poursuivre le dialogue pour apprendre à mieux connaître les Québécois. Ils soulignent d’ailleurs que des rencontres sont prévues avec des élus québécois.
Mme Elghawaby a déjà rencontré le chef du Bloc québécois Yves-François Blanchet, mercredi, avant de présenter ses excuses. Elle a également discuté jeudi avec le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez, qui s’était dit « profondément blessé par ses propos ». Il appuie désormais sa nomination. Elle doit également rencontrer Québec solidaire (QS) au cours des prochains jours.
« Nous sommes prêts à contribuer à un dialogue constructif entourant ces enjeux complexes et sensibles et nous nous engageons à combattre tous les préjugés, quels qu’ils soient », concluent-ils. La lettre est également signée par la commentatrice Anne Lagacé Dowson, ex-candidate du Nouveau Parti démocratique (NPD) en 2015, le philosophe Michel Seymour et Mohamed Labidi, qui était président de la mosquée de Québec lors de l’attentat en 2017 où six personnes ont été tuées. Ève Torres, qui avait fait les manchettes en 2021 lors du bras de fer entre Québec solidaire et son collectif antiraciste décolonial, est également signataire.
Le Bloc québécois a demandé jeudi la suppression du poste d’Amira Elghawaby, malgré ses excuses. Son chef Yves-François Blanchet estime que le premier ministre Justin Trudeau a « contaminé » ce poste en faisant « quelque chose qui a dérivé vers une dénonciation de l’identité et des valeurs québécoises » et en créant un « amalgame entre laïcité et islamophobie ».
Le député néo-démocrate Alexandre Boulerice a dénoncé cette prise de position « insensée et déconnectée de la réalité des communautés musulmanes ». La création du poste de représentante spéciale pour lutter contre l’islamophobie était l’une des recommandations du Sommet national sur l’islamophobie en 2021 en raison d’une montée des crimes haineux envers les musulmans au cours des dernières années.
Les excuses de Mme Elghawaby n’ont pas convaincu le gouvernement du Québec qui réclame toujours sa démission. En tout, trois des quatre partis représentés à l’Assemblée nationale estiment qu’elle ne peut pas entamer son mandat. Le Parti libéral du Québec et le Parti québécois ont appuyé une motion en ce sens présentée par la Coalition avenir Québec mercredi. Québec solidaire s’est abstenu de voter.
Le Parti conservateur du Canada demande également la démission d’Amira Elghawaby en raison de ses « remarques anti-québécoises, anti-juives et anti-policières ». Dans une autre de ses chroniques, Mme Elghawaby suggérait de désarmer les policiers.
Amira Elghawaby doit officiellement entrer en poste le 20 février pour un mandat de quatre ans. Le décret confirmant sa nomination indique qu’elle recevra un salaire compris entre 162 700 $ et 191 300 $.
Source: La presse