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Une nouvelle loi sonnera-t-elle le glas de TikTok aux États-Unis ? Dès le 19 janvier, il sera interdit de distribuer la populaire application sur le sol américain. La veille de l’arrivée à la Maison-Blanche de Donald Trump. Une situation qui ne plaît pas au futur président : il a demandé à la Cour suprême, déjà chargée d’évaluer la constitutionnalité de la loi, de repousser son entrée en vigueur.
« Le président Trump ne prend aucune position sur le fond de ce différend », écrit son avocat John Sauer – qui devrait devenir solliciteur général au département de la Justice – dans la requête.
Mais il demande aux juges d’accorder un délai « pour donner l’occasion à la future administration du président Trump de chercher une solution politique à cette question ». Précisant au passage que le président désigné compte 14,7 millions d’abonnés sur la plateforme.
La loi, adoptée par le Congrès en avril dernier de façon bipartisane, interdit la « distribution, la maintenance ou la fourniture de services d’hébergement internet pour une application contrôlée par un adversaire étranger ».
Le gouvernement américain cite des menaces à la sécurité nationale, affirmant que la société mère de TikTok, ByteDance, est redevable au gouvernement chinois et peut lui fournir des données sur les utilisateurs.
L’entreprise s’en défend, même si des enquêtes, notamment de Forbes, ont révélé l’espionnage de journalistes et un mauvais traitement des données d’utilisateurs.
Au Canada, l’application est offerte, mais le gouvernement fédéral a ordonné en novembre la fermeture des bureaux de TikTok au pays en raison de « risques pour la sécurité nationale ».
Cour suprême
Populaire pour ses courtes vidéos et son puissant algorithme, capable d’offrir un contenu hautement personnalisé à ses utilisateurs, le réseau lancé en 2017 compte plus de 1 milliard d’adeptes dans le monde et quelque 170 millions d’abonnés sur le sol américain.
Pour permettre à l’application de rester téléchargeable aux États-Unis, il faudrait que ByteDance vende TikTok ou que la Cour suprême lui donne raison sur ses allégations voulant que la liberté d’expression est bafouée par la nouvelle loi. Une cour d’appel a déjà tranché contre cette interprétation.
La Cour suprême doit entendre les arguments oraux des différentes parties vendredi.
Même si la loi entre en vigueur, ceux qui ont téléchargé TikTok aux États-Unis y auront toujours accès, mais sans la possibilité de faire des mises à jour.
« Je pense que le résultat de l’interdiction sera que la plupart des gens quitteront TikTok parce que ça deviendra moins pratique, et que TikTok, comme la plupart des médias sociaux, dépend du nombre suffisant de personnes qui l’utilisent », dit Alan Rozenshtein, professeur de droit de l’Université du Minnesota spécialiste de la question.
Il estime que la demande de Donald Trump de suspendre l’entrée en vigueur de la loi n’a pas de fondement juridique, le futur président étant encore un simple citoyen aujourd’hui.
Revirement
Pendant son premier mandat, Donald Trump avait lui-même tenté d’interdire TikTok aux États-Unis, évoquant des menaces à la sécurité nationale.
Il a changé son fusil d’épaule. « Tous ceux qui veulent sauver TikTok aux États-Unis, votez Trump ! », a-t-il écrit sur son réseau Truth Social en septembre.
La loi est « un problème très compliqué » pour la future administration, estime James Lewis, expert du Center for Strategic and International Studies.
Il a des gens dans son équipe qui sont très anti-Chine, très suspicieux de la Chine. Et il y a des gens qui s’inquiètent pour la liberté d’expression sur les réseaux sociaux, donc M. Trump devra travailler avec cette tension.
James Lewis, expert du Center for Strategic and International Studies
Les conservateurs derrière le Projet 2025 sont particulièrement préoccupés par le gouvernement chinois. Mais Donald Trump compte aussi des tenants fermes de la liberté à tout prix parmi ses supporteurs ; Elon Musk, par exemple, s’oppose à la loi « même si elle pourrait être bénéfique pour [son réseau] X », selon Forbes.
Un important donateur républicain, le milliardaire Jeff Yass, est aussi un investisseur important de ByteDance, a écrit le New York Times.
Risques
L’application est particulièrement populaire chez les jeunes. Des utilisateurs ont aussi lancé un cri du cœur pour défendre TikTok, mettant de l’avant l’impact financier potentiel pour eux d’une moins grande accessibilité à leurs contenus.
« Quand on parle aux utilisateurs de TikTok, ils savent qu’il y a un risque que leurs données soient accessibles à la Chine, mais ce n’est pas un grand souci pour eux », note M. Lewis.
Mais la menace chinoise est réelle dans le domaine technologique, ajoute-t-il. Il y a quelques jours, le département américain du Trésor a révélé que des pirates informatiques « parrainés par l’État chinois » avaient accédé à des documents.
« TikTok n’est pas notre plus gros problème, estime M. Lewis. Mais il est devenu le symbole d’un problème plus large, et ce sera donc difficile pour le président de faire marche arrière. »
Source: la presse