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Après une première semaine de campagne en Ontario, c’est assurément « tarif » qui se glisse au sommet du palmarès des mots les plus souvent prononcés par les chefs. Maintenant que le pays est à « l’abri » de la menace tarifaire – du moins pour février – les partis changeront-ils leur stratégie électorale? À qui profitera ce revirement?
L’équipe de Doug Ford avait prévu le coup et s’était préparée à la possibilité d’un sursis. Depuis des semaines, le chef progressiste-conservateur prévient que tarifs ou pas, il a besoin d’un nouveau mandat face à l’imprévisibilité du président américain.
Si les tarifs ne se matérialisent pas ce mois-ci, ce sera peut-être le mois prochain ou le suivant, répète le premier ministre sortant. En d’autres termes : les nuages au-dessus de l’économie ontarienne ne se dissiperont pas de sitôt et parmi tous les choix qui s’offrent aux électeurs, c’est Doug Ford qui défendra le mieux les entreprises d’ici.
En point de presse mardi, celui qu’on a rebaptisé capitaine Canada
insistait sur la nature temporaire de ce répit : le président va continuer d’utiliser la menace tarifaire pour obtenir ce qu’il veut
. Pour lui, rien n’a changé, la relation avec les États-Unis demeure fragile et il sollicite un mandat de quatre ans, qui peut dépasser celui du président Trump
.
Il serait d’ailleurs surprenant que son parti déroge au plan de match initial; Doug Ford demeure en tête des sondages, loin devant les autres chefs, pour qui le début de campagne a été laborieux (pour l’heure, seuls les progressistes-conservateurs ont nommé leurs 124 candidats).
Reste que la pause sur les tarifs douaniers donne plus de latitude aux autres partis pour braquer les projecteurs sur autre chose. Des enjeux restés dans l’ombre du conflit avec nos voisins du sud. Des enjeux comme la construction de logements, que Doug Ford avait promis d’accélérer, mais les mesures annoncées ont jusqu’ici donné des résultats lamentables.
Des enjeux comme l’accès à des soins primaires, alors que plus de deux millions d’Ontariens sont des patients orphelins, sans médecin de famille. Les libéraux en ont fait leur cheval de bataille. Même leur autobus de campagne est tapissé de statistiques macabres sur la qualité des soins dans la province. Le message de la cheffe Bonnie Crombie trouvera peut-être des oreilles plus attentives maintenant que les tarifs ont été évités.
Et c’est là que pourrait commencer le procès du gouvernement Ford. Les partis chercheront à faire le bilan de ses six années et demie au pouvoir et à mettre en lumière ses échecs. Il risque de moins bien paraître par rapport à ses réalisations ou son manque de réalisations dans des domaines comme la santé, l’éducation
, croit le politologue Peter Graefe.
Si l’élection change de ton, change de sujet, M. Ford a quand même certaines vulnérabilités.
Justement, la première annonce des néo-démocrates suivant le recul de Donald Trump portait sur le milieu scolaire. Une flèche directe contre le gouvernement sortant, qui a négligé les élèves et les enseignants, aux dires du NPD.
D’ailleurs, l’éducation est un dossier que maîtrise la cheffe Marit Stiles, une ancienne conseillère scolaire. Maintenant que l’échéancier des tarifs est remis, les chefs chercheront à jouer sur leurs forces plutôt que de s’improviser experts en relations diplomatiques.
Mais restons réalistes. Malgré toute la volonté des adversaires politiques de Doug Ford, le spectre des tarifs ne disparaîtra pas. Les tensions entre le Canada et la Maison-Blanche vont demeurer une préoccupation pour les électeurs. Avec les progressistes-conservateurs bien en selle, au petit trot vers un troisième mandat majoritaire, il faudrait que le vent tourne sérieusement pour les faire tomber de leur monture.
Source: Radio Canada