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Le gouvernement fédéral a finalement décidé d’intervenir dans le conflit de travail opposant Postes Canada et le Syndicat des travailleuses et travailleurs des postes (STTP). Il impose un retour au travail temporaire jusqu’en mai prochain aux 55 000 employés en grève et nomme un commissaire pour faire le point, a annoncé vendredi matin le ministre du Travail, Steven MacKinnon.
Les parties sont dans une impasse
et les Canadiens en ont ras le bol
, a déclaré le ministre du Travail. Il a demandé au Conseil canadien des relations industrielles (CCRI) de déterminer s’il croit qu’une résolution est possible à très court terme
. S’il en vient à la même conclusion que moi, il devra ordonner le retour au travail dès lundi prochain
et forcer la prolongation des conventions collectives existantes jusqu’au 22 mai 2025, a-t-il expliqué.
D’ici là, une Commission d’enquête sur les relations de travail sera créée pour examiner les problèmes empêchant la résolution du conflit de travail
. Elle devra s’attarder du même coup à l’ensemble de la structure de Postes Canada, tant du point de vue des clients que du point de vue industriel, en tenant compte de l’environnement commercial difficile auquel Postes Canada est confronté
.
Depuis 2018, Postes Canada perd des plumes, notamment sur le marché des colis. L’entreprise accuse des pertes de plus de 3 milliards de dollars. Et depuis le début de la grève le 15 novembre dernier, la quasi-totalité des services de Postes Canada sont paralysés. Ses clients se sont tournés massivement vers les entreprises privées de livraison.
Les négociations entre les deux parties devraient reprendre seulement lorsque le commissaire William Kaplan aura déposé un rapport, sur les bases de celui-ci. M. Kaplan est très connu et très respecté par l’ensemble des acteurs
, a assuré le ministre. Il connaît déjà Postes Canada pour y avoir servi en tant qu’arbitre
dans le passé.
M. MacKinnon espère que ses conclusions permettront la reprise des négociations sur une base solide
.
Le Syndicat dénonce avec la plus grande fermeté cette atteinte à notre droit constitutionnel de négocier collectivement et de faire la grève
, a déclaré par écrit le STTP.
Nous avons hâte d’accueillir notre personnel au travail et de servir la population et les entreprises canadiennes
, a indiqué Postes Canada, qui se dit prête à participer pleinement au processus et à [se] conformer aux directives du ministre
.
Trop tard pour Noël
Environ 55 000 employés de Postes Canada sont en grève partout au pays.
Les progrès réalisés sont limités et des divergences importantes demeurent
, a déclaré Steven MacKinnon.
Postes Canada et le Syndicat des travailleurs et travailleuses des postes (STTP) négocient depuis un an, mais peinent à s’entendre, notamment sur les questions des horaires de travail et des salaires. Leurs négociations ont même été suspendues pendant plusieurs jours, après l’intervention d’un médiateur fédéral.
Pendant ce temps, les problèmes causés par l’interruption de la livraison du courrier ne cessent d’augmenter au Canada, notamment pour les PME et dans les régions éloignées, où Postes Canada est le seul à offrir un service de livraison.
La Fédération canadienne de l’entreprise indépendante s’est dite soulagée d’apprendre que le gouvernement prend enfin des mesures pour mettre fin à la grève
.
Toutefois, elle indique dans un communiqué qu’il est trop tard pour sauver la saison des Fêtes pour les PME. Compte tenu de tous les retards accumulés, il sera presque impossible pour tout nouvel envoi d’être acheminé à temps aux consommateurs avant Noël par Postes Canada.
Une troisième intervention
Ottawa invoque l’article 107 du Code canadien du travail pour justifier cette démarche. Steven MacKinnon avait pourtant fermé la porte mercredi à la possibilité d’intervenir dans le conflit, demandant aux deux parties de commencer à prendre très au sérieux le travail qu’elles ont à faire et de conclure une entente au plus vite
.
Que dit l’article 107 du Code canadien du travail?
Le ministre peut prendre les mesures qu’il estime de nature à favoriser la bonne entente dans le monde du travail et à susciter des conditions favorables au règlement des désaccords ou différends qui y surgissent; à ces fins, il peut déférer au Conseil toute question ou lui ordonner de prendre les mesures qu’il juge nécessaires.
Lors du conflit de travail ferroviaire cet été, il s’est servi d’une interprétation inédite de cet article pour donner des ordres au CCRI, plutôt que de lui confier un mandat. Dans ce cas, Ottawa exigeait également du CCRI qu’il impose un arbitrage exécutoire.
Le Conseil a ensuite expliqué qu’il n’avait d’autre choix que de suivre les instructions du ministre, parce qu’il n’a pas l’autorité de réviser l’instruction du ministre
.
En novembre, Steven MacKinnon est intervenu ainsi dans le conflit de travail qui paralysait les ports de Montréal, de Québec et de la Colombie-Britannique.
Pour le STTP, cette ordonnance s’inscrit dans une tendance profondément troublante dans laquelle le gouvernement utilise ses pouvoirs arbitraires pour laisser les employeurs s’en tirer, traîner les pieds et refuser de négocier de bonne foi avec les travailleurs et leurs syndicats
.
Source: Radio Canada