Analyse | Gros changements en vue à Québec solidaire

14 novembre 2024
Analyse | Gros changements en vue à Québec solidaire

Assahafa.com

L’image est l’objet de moqueries à l’intérieur même des rangs du parti depuis plusieurs années. Sur la page Wikipédia consacrée à Québec solidaire (QS) apparaît ce qu’on présente comme l’organigramme de la formation politique. L’illustration n’est pas entièrement fidèle à la réalité, mais elle donne une bonne idée de la manière dont les choses fonctionnent à l’interne.

Les structures sont multiples et les liens entre elles, difficiles à saisir, tellement ils sont sinueux. En ce moment, des gens qui comprennent vraiment le fonctionnement de Québec solidaire, il doit y en avoir une trentaine, confie une personne bien au fait de ce qu’on appelle, dans le jargon, les statuts.

Lors de la rédaction de ces règles, l’idée était d’instaurer une démocratie collégiale. On voulait surtout empêcher un petit groupe de personnes d’exercer une influence indue sur les affaires du parti. Pour y arriver, on s’était notamment inspiré des façons de faire des centrales syndicales.

Dix-huit ans après la fondation de QS, on constate toutefois que cette façon de faire a ses limites. Le problème, c’est qu’on ne peut pas avoir les mêmes attentes envers des militants bénévoles qu’envers des délégués syndicaux qui sont en libération syndicale. Là, on en demande énormément à nos bénévoles, indique-t-on en coulisses.

Une véritable campagne à la direction

Premier changement qui sera proposé aux militants en fin de semaine : transformer les courses aux postes de co-porte-parole. L’année dernière, la course ayant opposé Émilise Lessard-Therrien à Christine Labrie et à Ruba Ghazal n’avait pas produit les retombées escomptées.

Comme seuls les délégués choisis pour participer au congrès avaient le droit de vote, il n’y avait pas d’incitatif pour que les candidates recueillent des dons ou recrutent de nouveaux membres. La course avait d’ailleurs suscité bien peu d’intérêt dans les médias.

Si la proposition sur la table est acceptée, on transformera la course à ces postes en véritable campagne à la direction. On implantera aussi le suffrage universel, de manière à accroître l’influence des membres et à renforcer la légitimité des porte-paroles.

Le chef serait un des co-porte-paroles

S’il n’est pas question de renoncer au système actuel des co-porte-paroles féminin et masculin, on propose toutefois de faire de l’un d’eux le chef du parti au sens de la loi.

Dans une séquence passée à l’histoire, lors du débat des chefs de 2018, Jean-François Lisée – alors à la tête du Parti québécois – avait accusé Québec solidaire de cacher son véritable chef. La fonction était alors occupée par le secrétaire du parti, un militant que personne ne connaissait.

À l’époque, QS avait ridiculisé l’attaque, y voyant une tentative de diversion. Six ans plus tard, on admet toutefois que le coup a porté. On veut se débarrasser de tout ce qui a l’air caché, tout ce qui est : il y a quelqu’un qui tire les ficelles par en arrière.

Et le politburo?

Le parti propose aussi une innovation : pouvoir poser des questions directement aux membres, à la manière d’un référendum. Les résultats obtenus lors de ces consultations auraient la même valeur qu’une résolution adoptée en congrès.

On souhaite par ailleurs revoir le fonctionnement du conseil national pour le rendre plus souple, transformer les associations régionales pour réduire le nombre de paliers décisionnels et fusionner les commissions thématiques avec les réseaux militants. L’addition de tous ces changements aurait pour effet d’accroître le pouvoir des membres.

L’idée, c’est de rapprocher les décisions des militants. Qu’on cesse de croire qu’il y a juste les gens qui siègent dans les instances ou au comité de coordination qui peuvent avoir de l’influence.

Le comité de coordination? C’est ce fameux comité que Jean-François Lisée avait jadis rebaptisé le politburo, en faisant allusion à l’entité qui dirigeait le Parti communiste en Union soviétique. L’ancien chef péquiste accusait ce comité d’avoir sapé les efforts de convergence des forces souverainistes, alors que des représentants du parti avaient avalisé la démarche.

À l’interne, des membres de Québec solidaire continuent parfois d’utiliser le mot de manière ironique. La réforme proposée n’abolirait pas ce comité, mais ferait en sorte que des décisions qui lui échoient présentement puissent être prises autrement, soit par le conseil national, ou encore, directement par les membres.

Optimisation et allègement

En faisant des appels auprès de gens impliqués dans les discussions, on constate que des mots comme allègementoptimisation et leurs divers synonymes reviennent souvent pour décrire les changements proposés – des mots qu’on associe plus spontanément à des ministres de la Coalition avenir Québec (CAQ), en quête d’économies pour réduire le déficit budgétaire, qu’à des membres de QS.

N’empêche, en ce moment, les instances grugent énormément de ressources et d’énergie, qui pourraient être mises sur le financement ou sur le travail de terrain, affirme un militant de longue date.

En abolissant des structures et en simplifiant certains processus, on espère surtout stimuler la participation des membres et en attirer de nouveaux. Les membres sont las que leurs idées n’aboutissent pas. Chaque morceau de décision doit être validé par différents comités et comme souvent ce ne sont pas les mêmes personnes qui siègent sur les différents comités, ça devient rapidement très complexe, fait valoir l’une de nos sources.

Le printemps dernier, Gabriel Nadeau-Dubois faisait d’ailleurs le constat que la structure actuelle de sa formation politique expliquait en partie son incapacité à croître. On demeure un parti de membres, démocratique, mais il faut qu’on passe moins de temps en réunion et plus de temps sur le terrain. Il faut aussi donc qu’on évolue dans notre structure interne, pour être plus proche des gens, avait-il expliqué, en entrevue au Devoir.

Dans les rangs du parti, certains se méfient toutefois des changements proposés et redoutent un affaiblissement de la démocratie interne. Pour être adoptés, les nouveaux statuts devront être avalisés par les deux tiers des délégués qui participeront au congrès de la fin de semaine.

Source: Radio Canada

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