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On ne prendra pas Mélanie Joly à se perdre en conjectures sur les impacts d’un possible retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. La seule prédiction qu’elle se permet de faire : une victoire du républicain fera des vagues sur la scène internationale.
« Ce que je peux dire, c’est que ce sont des élections très importantes qui vont avoir des conséquences importantes sur la vie des Américains, certes, et aussi sur la géopolitique mondiale », se limite-t-elle à dire en entrevue.
« Je sais que c’est intéressant, enchaîne-t-elle. Tout le monde au pays et à travers le monde veut avoir cette réponse, et ma réponse va être toujours la même, un point c’est tout. Pourquoi ? Parce que le Canada, nous, on va être là pour défendre nos intérêts nationaux. »
Et « tant et aussi longtemps que les Américains n’ont pas fini de faire leur choix, le Canada, on suit de très près, et on est prêt », insiste la cheffe de la diplomatie canadienne lors d’un entretien qui s’est déroulé à l’issue d’une rencontre internationale sur l’Ukraine, à Montréal.
En Ukraine aussi, on a évidemment les yeux rivés sur ce qui se passe aux États-Unis. Lorsque Donald Trump a accueilli le président ukrainien Volodymyr Zelensky à New York, fin septembre, il a parlé de sa « bonne relation » avec l’ennemi numéro un de Kyiv, le président russe Vladimir Poutine.
De la guerre en Ukraine à celle au Moyen-Orient en passant par la menace nucléaire que brandit sporadiquement la Corée du Nord, les enjeux explosifs ne manquent pas. Et Donald Trump est en porte-à-faux avec ses alliés occidentaux sur plusieurs d’entre eux.
La ministre Joly ne veut pas dire quelles conséquences géopolitiques précises elle a en tête. « Non. Parce que je suis dans une question hypothétique », tranche-t-elle.
Quand je vais savoir quel sera le résultat des élections, je pourrai en dire davantage. Sinon, non.
Mélanie Joly, ministre des Affaires étrangères du Canada
Cette approche est celle qu’il faut préconiser, juge Catherine Loubier, ancienne déléguée générale du Québec à New York. « Il ne faut pas braquer le prochain gouvernement des États-Unis en disant : “Je crains une administration avec Donald Trump à sa tête.” Ce serait terrible », selon elle.
Le mot commençant par « F »
À l’époque où il était chef du Nouveau Parti démocratique, en mars 2016, Thomas Mulcair avait reproché à Justin Trudeau son refus de critiquer Donald Trump, alors candidat à l’investiture républicaine. Il l’avait fait en utilisant le mot commençant par « F » qu’on a entendu de la bouche d’anciens proches collaborateurs du président.
« Donald Trump est un fasciste, avait-il déclaré. Il ne faut pas se leurrer, il ne faut pas tourner autour du pot. Je n’hésiterai pas à souligner le fait que M. Trudeau se contente de hausser les épaules lorsqu’on lui parle de Donald Trump et qu’il dit : « Oh, la relation [entre] Canada et les États-Unis va au-delà de deux individus. »
Son successeur à la barre néo-démocrate, Jagmeet Singh, a également eu des mots durs à l’égard de l’ex-locataire de la Maison-Blanche. « Il se présente pour des raisons narcissiques, il a soif de vengeance, a-t-il dénoncé en janvier dernier. Ça va être mauvais pour le Canada s’il est réélu. »
Un ministre pour la relation canado-américaine ?
À Ottawa, un remaniement doit avoir lieu après l’annonce du départ de quatre ministres.
Les médias ont été informés que ce battage des cartes surviendrait après la présidentielle aux États-Unis, ce qui a alimenté les spéculations sur la possibilité qu’un poste soit créé spécifiquement pour s’occuper de la relation bilatérale.
La ministre Joly ressent-elle le besoin d’avoir du renfort ? « La façon dont notre gouvernement, on a toujours coordonné, c’est que le premier ministre est en charge, puis en même temps, tous les ministres, on travaille sur différents enjeux », a-t-elle esquivé en mêlée de presse, mardi dernier.
Avant elle, Chrystia Freeland avait le double mandat de s’occuper des affaires étrangères en plus de piloter la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain (ALENA). On lui avait adjoint un secrétaire parlementaire chargé de la relation entre le Canada et les États-Unis, l’ancien député et général à la retraite Andrew Leslie.
Il fallait alors apprivoiser un voisin que le gouvernement libéral n’avait pas vu arriver.
Cette fois, on ne s’y fera pas prendre, jure Mélanie Joly. « On a des liens à plein de niveaux des deux côtés », indique celle qui avait organisé l’été dernier un appel entre Justin Trudeau et Donald Trump grâce à son lien avec le sénateur républicain Lindsey Graham.
Source: la presse