Les maires ont défendu Northvolt sans connaître l’impact environnemental

19 août 2024
Les maires ont défendu Northvolt sans connaître l’impact environnemental

Assahafa.com

Les maires de McMasterville et de Saint-Basile-le-Grand ont appuyé et défendu le projet de Northvolt, alors qu’ils ignoraient les impacts environnementaux, selon une lettre obtenue par Radio-Canada grâce à la Loi sur l’accès aux documents. « Nous sommes consternés par votre absence et votre mutisme », ont-ils écrit au ministre de l’Environnement, Benoit Charette, en quête d’informations pour rassurer leurs citoyens.

Le 28 septembre 2023, lors de l’annonce du plus gros projet industriel privé de l’histoire du Québec, Martin Dulac et Yves Lessard posaient fièrement aux côtés des premiers ministres François Legault et Justin Trudeau, une batterie de Northvolt dans les mains.

Nous saluons cette arrivée sur notre territoire et nous avons bon espoir qu’il s’agira d’un projet exemplaire à tous égards, déclarait alors le maire de McMasterville, très favorable.

En entrevue avec Radio-Canada, M. Dulac se disait rassuré par les réponses très claires de Northvolt sur les potentiels impacts environnementaux du projet. Le 4 octobre 2023, il affirmait même être enthousiaste par rapport au fait que lui et ses collègues étaient informés des tenants et aboutissants de ce projet-là.

Nous avons posé les mêmes questions que celles que se posent nos citoyens à l’heure actuelle. Nous avons obtenu des réponses qui étaient satisfaisantes.

Or, à ce moment-là, et durant les mois qui allaient suivre, le maire de McMasterville ignorait à peu près tout des impacts environnementaux du projet de méga-usine de batteries.

C’est ce qu’on découvre dans la lettre que lui et le maire de Saint-Basile-le-Grand ont fait parvenir au ministre de l’Environnement du Québec, Benoit Charette, le 19 janvier 2024.

Un ton bien différent en coulisses

Dans la lettre, de haute importance, les deux maires font part au ministre Charette de leur insatisfaction relativement au manque de communication et à l’absence de réponse qui émanent de votre ministère relativement à l’arrivée de l’entreprise Northvolt sur les territoires de Saint-Basile-le-Grand et McMasterville.

Les maires affirment avoir eu beaucoup de courage politique en s’efforçant de répondre à leurs citoyens, pour les rassurer, afin d’atteindre l’acceptabilité sociale, alors qu’ils n’avaient toujours pas obtenu de réponses à leurs questions. Des questions sur l’impact environnemental du projet, posées à maintes reprises au ministère, durant des mois.

Nous sommes consternés par votre absence et votre mutisme, autant dans les discussions avec les instances de nos villes que dans la sphère publique et médiatique.

Une citation deExtrait de la lettre des deux maires adressée au ministre de l’Environnement du Québec

Le maire de Saint-Basile-le-Grand, Yves Lessard, avait lui aussi défendu le projet devant ses citoyens avant d’écrire cette lettre, mais avec un enthousiasme modéré. Il avait d’ailleurs publiquement remis en question l’absence d’examen du Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) pour un projet d’une telle ampleur.

Ça n’a pas empêché les services de sa municipalité de lancer les démarches pour délivrer un permis à l’entreprise, en janvier, avant même que les impacts environnementaux soient connus.

Devant ses citoyens, en octobre, au sujet de l’environnement, Yves Lessard avait affirmé : Il n’y aura pas de bruit. Ce n’est pas bruyant, ce n’est pas polluant, il n’y a pas d’odeur.

Il s’appuyait sur sa propre visite de l’usine de Northvolt en Suède, le même modèle qui verra le jour au Québec. Sauf que lors de sa visite en sol suédois, l’usine n’avait pas encore atteint son plein rendement. Il le sera en 2026 (Nouvelle fenêtre).

Ça ne me rassure pas du tout, dit la résidente de McMasterville Jacinthe Villeneuve, à qui nous avons fait lire la lettre. Cette citoyenne s’implique depuis des mois pour demander plus de transparence autour de ce projet.

Elle rappelle que les élus locaux se faisaient très rassurants lors de leurs réponses aux citoyens, à l’automne 2023.

C’est un peu aberrant qu’ils aient voulu montrer que c’était un beau projet, alors qu’eux-mêmes n’avaient pas de réponses à leurs questions.

Les deux maires s’expliquent

Invité à expliquer les différences entre son discours public et privé, le maire de McMasterville nous a fait parvenir cette déclaration écrite : Il nous apparaissait important que le ministère vienne rencontrer directement notre population pour répondre aux préoccupations environnementales soulevées.

Nous étions satisfaits des réponses obtenues, mais la Ville n’avait pas à se substituer au ministère pour répondre aux enjeux environnementaux.

Une citation deMartin Dulac, maire de McMasterville, dans un courriel à Radio-Canada

Radio-Canada a demandé à obtenir le document « Questions-Réponses » que les maires ont envoyé au ministère de l’Environnement, mais cette demande a été refusée.

La Ville de Saint-Basile-le-Grand rappelle que le contexte de la lettre était de faire pression pour obtenir des séances d’information des fonctionnaires du ministère de l’Environnement avec les citoyens des deux municipalités.

Le ministère de l’Environnement avait d’abord promis ces séances d’information pour novembre 2023. Elles ont finalement eu lieu à la fin février.

Le maire Yves Lessard pense que la lettre a aidé, tout comme la discussion franche et constructive qui a suivi avec le ministre Charette.

Durant ces séances d’information, les fonctionnaires du ministère de l’Environnement ont été incapables de nommer les polluants que Northvolt rejettera éventuellement dans l’atmosphère ou dans la rivière.

Et si le ministère de l’Environnement ne répondait pas aux villes parce qu’ils n’ont pas eux-mêmes les réponses? Ce serait encore plus inquiétant! ajoute Jacinthe Villeneuve.

L’organisation des séances d’information a dû être orchestrée entre les différents ministères concernés en fonction de leurs dossiers respectifs, et ce afin de bien répondre aux questions des citoyens, explique le cabinet du ministre Benoit Charette, dans un courriel à Radio-Canada.

De plus, la judiciarisation du dossier à la même période où devaient se tenir les séances d’information nous a contraints de les reporter, ajoute son équipe. Entre-temps, une page web regroupant l’ensemble des informations était accessible et mise régulièrement à jour pour répondre aux préoccupations des citoyens.

Le gouvernement s’assure de bien soutenir et accompagner les municipalités pour qu’elles aient toute l’information nécessaire en vue de répondre aux interrogations de leurs citoyens.

Une citation deCabinet du ministre de l’Environnement du Québec

Pendant que les maires cherchaient des réponses et que le ministère ne les donnait pas, les médias démontraient les impacts du projet sur les milieux humides, les boisés, les espèces fauniques ainsi que la rivière Richelieu.

Les messages qui sont véhiculés dans la presse sont autant vagues que nébuleux, et l’image de la compagnie Northvolt en fait les frais, de même que la crédibilité de nos municipalités, ont écrit Martin Dulac et Yves Lessard, dans leur lettre au ministre.

Il est déplorable de constater que votre manque de transparence et de leadership dans ce dossier risque de décourager les investisseurs étrangers à soumettre des projets d’envergure au Québec.

Une citation deExtrait de la lettre des deux maires adressée au ministre de l’Environnement du Québec

Les municipalités se disent toutefois satisfaites de la collaboration de l’entreprise Northvolt.

Source: Radio Canada

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