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Les ambassadeurs de plusieurs pays à Ottawa cherchent actuellement à discerner quelle serait la position d’un éventuel gouvernement fédéral dirigé par le Parti conservateur en matière de politique étrangère, alors que le chef de la formation, Pierre Poilievre, n’a pas révélé beaucoup de détails sur la stratégie qu’il voudrait adopter sur la scène internationale en tant que premier ministre.
Dans la capitale fédérale, de nombreux diplomates ont avoué qu’ils ne sont pas convaincus que les conservateurs maintiendraient les engagements pris par le gouvernement actuel en matière de lutte aux changements climatiques et de soutien envers l’Ukraine s’ils étaient portés au pouvoir.
L’absence d’engagement ferme envers les accords climatiques du Canada préoccupe particulièrement les alliés européens, même si les libéraux n’ont pas tenu leurs propres promesses dans ce dossier.
S’ils ont accepté de s’entretenir avec La Presse Canadienne, ces diplomates ont accepté de le faire seulement s’ils n’étaient pas cités directement, afin d’éviter tout risque de nuire à leurs relations diplomatiques avec le Canada.
Selon le vice-président de la firme de communications et de consultants StrategyCorp, Garry Keller, M. Poilievre tente « d’abord de mettre en place son discours en matière d’économie locale, laissant les dossiers comme la politique étrangère à ses collègues ».
Habituellement, ce ne sont pas les positions en matière de politique étrangère qui font pencher la balance lorsqu’un électeur se retrouve dans l’urne lors d’une journée d’élections, a noté M. Keller, qui peut donc comprendre que M. Poilievre se concentre d’abord sur des sujets comme le logement et les soins de santé.
Mais l’ancien ministre de l’Immigration Chris Alexander, qui a servi sous le gouvernement de Stephen Harper, estime que M. Poilievre pourrait être plus ferme quant à ses positions sur ces dossiers, notamment en raison des enjeux cruciaux que sont les conflits internationaux et les changements climatiques.
« Les gens sont en droit d’en demander davantage à leur chef de l’opposition », pense-t-il.
Certaines promesses
Depuis qu’il a pris les rênes du Parti conservateur, il y a près d’un an, M. Poilievre a tout de même fait quelques promesses à certaines diasporas du pays, comme de mettre en place un service de vols directs entre le Canada et Amritsar, une ville de l’Inde qui est la capitale spirituelle de la communauté sikhe.
Il s’est aussi distancé des positions du Parti libéral en s’engageant à être plus sévère envers certaines entités internationales. En tant que premier ministre, M. Poilievre compte entre autres officiellement classer le Corps des gardiens de la révolution islamique comme groupe terroriste — une annonce qu’attend impatiemment la communauté iranienne au Canada.
Cependant, il a laissé une grande partie du travail sur le dossier de la politique étrangère à certains de ses députés les plus influents à la Chambre des communes.
Son porte-parole en matière d’Affaires étrangères, Michael Chong, a d’ailleurs souvent accusé les libéraux de ne pas avoir été assez fermes dans les dossiers d’ingérence. M. Chong a été un acteur clé dans ce dossier, alors que différents médias ont révélé que des membres de sa propre famille à Hong Kong auraient été ciblés par un diplomate chinois à Toronto.
M. Chong a demandé à Ottawa d’expulser des diplomates de pays comme la Chine et la Russie en réponse à leur ingérence présumée dans les processus démocratiques et les communautés de la diaspora.
Le porte-parole conservateur responsable du Développement international, Garnett Genuis, a quant à lui mené la charge du Parti conservateur concernant l’élimination de l’esclavage dans les chaînes d’approvisionnement, mettant l’accent sur les allégations de mauvais traitements réservés aux Ouïghours en Chine.
Et la cheffe adjointe de la formation, Melissa Lantsman, a récemment abordé certaines priorités des conservateurs en matière de politique étrangère.
« Je veux voir une politique étrangère fondée sur une vision conservatrice. Une politique de démocratie, de liberté et d’état de droit, axée sur notre propre sécurité et sur ce que nous pouvons donner au monde — parce que nous avons beaucoup à donner », a-t-elle affirmé en mars lors d’un panel.
En continuité avec les autres chefs
Selon M. Keller, de la firme StrategyCorp, ces quelques éléments qui ont été mis de l’avant par M. Poilievre et son équipe sont en phase avec les priorités du précédent chef du parti, Erin O’Toole.
Lors de la campagne électorale de 2021, M. O’Toole avait promis de « remplacer la signalisation de la vertu par un véritable programme international » en adoptant une ligne de conduite plus dure contre les dictatures aux Nations unies. Le programme de M. O’Toole suggérait aussi de renforcer le commerce avec l’Afrique et d’améliorer la collaboration avec les États-Unis dans l’Arctique.
M. Keller a également rappelé que la politique étrangère de M. O’Toole était elle-même fortement influencée par le conseiller en politique étrangère de l’ère Harper, Shuvaloy Majumdar, qui a été élu le mois dernier en tant que député fédéral à Calgary.
L’expert s’attend à ce que M. Majumdar et sa collègue Stephanie Kusie, aussi députée à Calgary, contribuent à façonner l’approche de M. Poilievre. Mme Kusie a notamment travaillé comme diplomate canadienne en Amérique latine et au Texas.
Dans une déclaration écrite, le bureau de M. Poilievre a indiqué qu’il visait à restaurer la réputation du Canada sur la scène internationale en faisant preuve de « gros bon sens », plaidant que le premier ministre Justin Trudeau a affaibli la position du Canada sur l’échiquier mondial.
« Malgré huit ans de jet-set à travers le monde pour rencontrer des célébrités et des élites, M. Trudeau n’a réussi qu’à laisser une traînée d’embarras aux frais des contribuables », a écrit le porte-parole de M. Poilievre, Sebastian Skamski.
« Ce gouvernement libéral a laissé tomber nos alliés à maintes reprises, ce qui signifie qu’ils ne peuvent plus nous faire confiance. »
Source: La presse