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Alexandre Trudeau, le frère du premier ministre Justin Trudeau, est convoqué à comparaître devant un comité parlementaire afin d’expliquer son rôle dans l’affaire du don chinois lié à Pékin à la Fondation Pierre Elliot Trudeau.
Son témoignage doit avoir lieu mercredi prochain devant le comité de l’accès à l’information, protection des renseignements personnels et éthique, qui se penche sur l’ingérence étrangère et les menaces que cela pose sur les institutions démocratiques.
Alexandre Trudeau avait exprimé le souhait d’être entendu par ce comité dans une entrevue qu’il a accordée au quotidien Le Devoir cette semaine.
« Je veux témoigner devant le comité qui s’en occupe. Je suis prêt à dire tout ce que je sais sur la fondation. Ça presse ! » a-t-il notamment affirmé au quotidien.
Il a aussi affirmé que la Fondation qui porte le nom de son père et auprès de laquelle il s’est impliqué au cours des 20 dernières années avait été la cible « d’attaques malhonnêtes » et qu’il tenait à remettre les pendules à l’heure.
Le président du comité de l’éthique, le député conservateur John Brassard, a exaucé son souhait au moment où l’ancienne présidente et chef de la direction Fondation Pierre Elliott Trudeau, Pascale Fournier, achevait son témoignage, vendredi, sur les évènements houleux qui ont mené à sa démission récemment.
Durant son témoignage de près de deux heures, Mme Fournier, qui a dirigé les destinées de la Fondation pendant les cinq dernières années, a expliqué qu’elle a quitté ses fonctions en raison du refus de certains membres du conseil d’administration de prendre les moyens qui s’imposent afin de faire la lumière sur le don chinois de 140 000 $.
Ces membres sont Edward Johnson, Bruce McNiven et Peter Sahlas. M. Johnson, qui a déjà été adjoint exécutif de Pierre Trudeau lorsqu’il était premier ministre, a aussi été invité à témoigner. Il était à la tête de la Fondation quand le don chinois été fait.
« Nous avons été frappés par cette crise […] concernant la possibilité qu’il y ait eu une ingérence et que la Fondation ait été utilisée pour des circonstances autres qu’un simple don qui devait servir à organiser des conférences portant sur la Chine », a expliqué Mme Fournier, qui a démissionné en même temps que huit autres membres du conseil d’administration de la Fondation.
La Fondation a été éclaboussée en février, après que le quotidien The Globe and Mail a rapporté que le Service canadien du renseignement de sécurité (SCRS) aurait intercepté une conversation entre un attaché commercial d’un consulat chinois et le richissime homme d’affaires chinois Zhang Bin.
L’échange de 2014 portait sur l’élection à venir en 2015, et la possibilité que les libéraux de Justin Trudeau aient le dessus sur les conservateurs de Stephen Harper. Un ordre aurait été donné à Zhang Bin par Pékin : faire un don d’un million de dollars à la Fondation Trudeau, en échange de remboursement.
Un an plus tard, en 2016, le milliardaire et un deuxième riche homme d’affaires chinois offraient 1 million de dollars pour honorer la mémoire de l’ancien premier ministre Pierre Elliott Trudeau, y compris un chèque de 200 000 $ à la Fondation. Au bout du compte, la somme de 140 000 $ a été remise à la Fondation. L’existence de ces contributions était connue, mais pas le contexte dans lequel elles s’inscrivaient.
Devant le comité, Mme Fournier a expliqué qu’elle souhaitait faire la lumière sur ce don, d’autant plus que des informations différentes sur sa provenance apparaissaient dans les rapports annuels de la Fondation et dans les reçus de charité qui ont été remis par l’organisme pour le don qui a été fait en deux versements.
« Les noms des deux donateurs n’apparaissaient pas en 2016 sur les reçus présentés par la Fondation et l’adresse était en Chine. Le deuxième reçu en 2017 est un peu différent du premier reçu. Le nom de l’entreprise, l’adresse est au Québec et les noms des donateurs sont sur le document », a-t-elle expliqué.
Ces informations divergentes au sujet de la provenance du don expliquent pourquoi elle jugeait essentiel de faire la lumière en demandant une enquête juricomptable. Mais les membres du conseil d’administration qui étaient en poste au moment de ces évènements s’opposaient à une telle démarche. C’est ce qui a mené à la démission de plusieurs membres.
« C’était mon intention de demander à des avocats de faire la lumière sur cette question », a-t-elle indiqué, précisant que ces évènements sont survenus avant son arrivée à la tête de la Fondation en juillet 2018.
« Il y avait une rupture du lien de confiance. […] Lorsqu’on fait la lumière, ce qui est très important, c’est de garantir l’indépendance du processus d’enquête. »
En effectuant des recherches internes, elle a constaté qu’une association basée en Chine était en communication avec les employés de la Fondation, non pas pour discuter de l’organisation de conférences sur la Chine, comme le prévoyait le contrat officialisant le don, mais pour donner des « directives » sur ce qui devait apparaître sur les reçus émis par la Fondation. « J’ai trouvé ça très particulier et dérangeant », a-t-elle dit. « Il y avait toutes sortes de faits qui m’apparaissaient incompréhensibles. J’ai voulu faire la lumière sur tout ça ».
Mme Fournier a affirmé que c’est Alexandre Trudeau qui a signé le contrat portant sur le don chinois, même si en principe, il n’avait pas l’autorité pour le faire.
À la mi-avril, la Fondation a finalement pu rembourser ce don de 140 000 $ qui l’avait plongée dans la tourmente.
Source: La presse