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Premier État occidental à reconnaître l’indépendance de l’Ukraine, terre d’accueil de la deuxième diaspora ukrainienne en importance dans le monde, le Canada a vite choisi son camp au lendemain de l’invasion russe. Si sa compréhension du pays lui procurait un « avantage comparatif », selon un expert, ses prises de position depuis le 24 février 2022 relèvent davantage de celles d’un « suiveur » que d’un leader, d’après un autre spécialiste.
La réaction à la première pluie de missiles a été immédiate à Ottawa. « L’attaque de la Russie contre l’Ukraine est une attaque contre la démocratie, la loi internationale et la liberté », dénonçait Justin Trudeau. « Quand nous nous sommes réveillés ce matin, le monde était différent », renchérissait sa vice-première ministre, Chrystia Freeland.
Ce qui n’avait pas changé, c’était l’engagement du Canada envers l’Ukraine. « Il n’y a pas de politique partisane ici. C’est la seule communauté qui a envoyé cinq vagues d’immigration au Canada depuis 110 ans. Nous avons donc toujours eu un avantage comparatif par rapport aux autres pays en ce qui a trait à la compréhension de l’Ukraine », souligne le politologue Dominique Arel, rattaché à l’Université d’Ottawa.
Le 24 février 2022, le gouvernement annonçait ainsi une première vague de ce qui est devenu un tsunami – à efficacité variable – de sanctions contre le régime Poutine.
Il avait déjà frappé le Kremlin de sanctions en réaction à l’annexion illégale de la Crimée en 2014, mais « on sait maintenant qu’elles étaient risibles », argue le professeur.
À l’époque, il était inimaginable de fournir du matériel militaire à Kyiv ; aussi Ottawa a-t-il opté pour la création d’une mission baptisée Unifier, qui a permis de former à ce jour plus de 35 000 forces de sécurité ukrainiennes. « Ce qui a changé, c’est que Poutine a commis l’impensable », insiste M. Arel, titulaire de la Chaire en études ukrainiennes.
Des gilets pare-balles aux Leopard 2
Il a fallu attendre avril avant que le Canada n’envoie de l’artillerie lourde à l’Ukraine. Aux gilets pare-balles et lunettes de vision des premiers jours ont succédé des obusiers M777, puis un système national de missiles surface-air (coût : environ 406 millions), puis quatre chars d’assaut Leopard 2.
Dans la plupart des cas, les annonces canadiennes suivent celles d’autres partenaires, en particulier les États-Unis. « Le Canada n’est certainement pas un leader ni un cancre. Le qualificatif que j’emploierais, c’est suiveur », commente Justin Massie, codirecteur du Réseau d’analyse stratégique (RAS) et professeur à l’Université du Québec à Montréal.
En matière d’aide financière, avec ses quelque 5 milliards, le Canada « fait quand même très bonne figure en termes absolus », mais en proportion de la taille de son économie, il se retrouve en 27e position sur 40 pays donateurs, d’après une analyse du Kiel Institute, précise-t-il.
Là où les moyens ne sont de toute évidence pas au rendez-vous, c’est sur le plan militaire, dit-il.
Car les Forces armées sont « très réticentes » à l’idée de se départir d’équipements, de peur que ceux-ci ne soient pas remplacés par le gouvernement – « et avec raison, parce qu’il y a eu très peu d’annonces de remplacement d’équipements ou d’acquisition de nouvelles capacités militaires pour compenser », signale M. Massie.
Et la diplomatie ?
L’ancien ambassadeur du Canada en Ukraine G. Daniel Caron s’est fait discret dans les médias au cours de la dernière année. Mais celui qui fut chef de mission à Kyiv de 2008 à 2011 a mûri ses réflexions.
« Malheureusement, comme l’a dit [l’ex-premier ministre canadien] Lester B. Pearson, il a trop souvent été trop facile pour les dirigeants d’initier l’homme à la guerre… oh, là, je ne me ferai pas aimer… », s’interrompt-il au téléphone avant de poursuivre.
En somme, il se demande si on envisage une solution diplomatique, au-delà de l’envoi d’aide militaire. « Je ne comprends pas qu’on ne crée pas un comité de haut niveau pour négocier. [La ministre des Affaires étrangères] Mélanie Joly et ses homologues ont-ils des échanges à ce sujet ? »
« Ma position, c’est que personne ne gagnera cette guerre génocidaire », se désole-t-il.
Et la diplomatie ?
L’ancien ambassadeur du Canada en Ukraine G. Daniel Caron s’est fait discret dans les médias au cours de la dernière année. Mais celui qui fut chef de mission à Kyiv de 2008 à 2011 a mûri ses réflexions.
« Malheureusement, comme l’a dit [l’ex-premier ministre canadien] Lester B. Pearson, il a trop souvent été trop facile pour les dirigeants d’initier l’homme à la guerre… oh, là, je ne me ferai pas aimer… », s’interrompt-il au téléphone avant de poursuivre.
En somme, il se demande si on envisage une solution diplomatique, au-delà de l’envoi d’aide militaire. « Je ne comprends pas qu’on ne crée pas un comité de haut niveau pour négocier. [La ministre des Affaires étrangères] Mélanie Joly et ses homologues ont-ils des échanges à ce sujet ? »
« Ma position, c’est que personne ne gagnera cette guerre génocidaire », se désole-t-il.
La prochaine étape
Le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, n’est pas du même avis : l’Ukraine en sortira victorieuse.
Il faudra toutefois du renfort : des avions de chasse, réclame maintenant le dirigeant.
La requête n’a pas été formulée explicitement au Canada, a relaté vendredi dernier la ministre Joly, à l’issue de sa visite en Ukraine. « Le président ne m’a pas fait de demande directement », a-t-elle dit par visioconférence.
« C’est sûr qu’on a toujours fait notre part, on va continuer à faire notre part », a ajouté la cheffe de la diplomatie canadienne.
Les États-Unis n’ont pour l’instant manifesté aucune intention de livrer à l’Ukraine des avions de chasse, dont le pilotage requiert une rigoureuse formation.
De passage à Kyiv, lundi, à quelques jours du premier anniversaire du début de la guerre commencée par la Russie, le président Joe Biden a toutefois annoncé une nouvelle aide militaire de 500 millions pour l’Ukraine.
Source: La presse