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L’Afrique s’est positionnée comme un acteur central de la mise en œuvre du Pacte Mondial pour des Migrations Sûres, Ordonnées et Régulières (pacte de Marrakech), a affirmé, mercredi, le ministre des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, Nasser Bourita.
« Alors même que la migration africaine est stigmatisée, surchargée de préjugés et associée à des conceptions binaires, l’Afrique s’est positionnée comme un acteur central de la mise en œuvre du Pacte », a souligné le ministre à l’ouverture de la première réunion intergouvernementale pour l’Examen régional du Pacte mondial pour des migrations sûres, ordonnées et régulières.
M. Bourita, qui présidait cette conférence tenue virtuellement, a précisé que des grandes mesures africaines récentes sont des marqueurs à cet égard , citant notamment la mise en place effective de l’Observatoire Africain des Migrations dont le siège a été inauguré le 18 décembre 2020 à Rabat.
Cette Instance de l’UA – qui est la toute première à siéger au Maroc – est née d’une Vision Royale, portée par l’Agenda africain sur la Migration, a-t-il poursuivi, notant que l’Observatoire est, aussi, une déclinaison directe du Pacte de Marrakech, et en particulier de son objectif premier, qui est de collecter et d’utiliser des données précises qui serviront à l’élaboration de politiques fondées sur la connaissance des faits.
La seconde mesure concerne la participation notoire de l’Afrique au Fonds multipartenaires de la Migration, a-t-il fait observer, précisant qu’il s’agit d’un mécanisme mis en place en vue d’assister les pays dans la mise en œuvre du Pacte.
En effet, 16 des 39 projets – soit 41% du total des projets retenus pour financement, ont été soumis par des pays africains, a indiqué M. Bourita, relevant que l’Afrique s’est également, distinguée avec 4 projets collectifs, donnant ainsi l’exemple d’une gestion régionale concertée, que le Pacte de Marrakech appelle de ses vœux.
Le ministre a aussi estimé que la migration en Afrique est, d’abord, régionale, soulignant que c’est « d’abord » au niveau des Etats du Continent et de chacune de ses sous-régions, qu’elle doit être traitée.
Il a dans ce sens rappelé que la conscience précoce du Maroc qu’une mise en œuvre efficace du Pacte de Marrakech au niveau régional, commence à l’échelon national, précisant qu’en lançant sa Stratégie nationale d’immigration et d’asile, en 2013, le Royaume la voulait à la fois responsable et solidaire, à l’image de l’approche qu’il a défendue dans l’Agenda Africain pour la Migration en janvier 2018 et le Pacte Mondial en décembre de la même année.
Cette cohérence entre l’engagement national, régional et global, est une manière de se rapprocher au plus près de l’objectif d’optimiser la migration au lieu de la combattre, a-t-il encore dit.
M. Bourita a en outre affirmé que l’impact de la pandémie sur les migrations est indéniable, faisant observer que si ses retombées économiques et sociales ont accentué la précarité des travailleurs migrants, elle a aussi ralenti la mobilité d’une manière générale.
La fermeture des frontières a asséché, pour un temps, les routes migratoires, et rendu les traversées encore plus périlleuses, a-t-il indiqué, soutenant qu’elle n’a pas, pour autant, détruit le commerce morbide des passeurs et autres marchands de misère.
Du point de vue des gouvernements, la pandémie a, sans nul doute, complexifié la gouvernance migratoire, tout en soulignant la centralité du Pacte de Marrakech et en rappelant à tous la pertinence universelle de ses objectifs, a poursuivi le ministre.
Il a aussi relevé que la crise a fortement souligné l’importance de la régularisation de la situation des migrants, et la nécessité de garantir leur accès à la sécurité sociale – et la sécurité tout court.
A la manière d’une mise en abyme, la migration en temps de pandémie s’est imposée comme une crise dans la crise – à ceci près que la migration n’est pas une « crise », mais un phénomène structurellement durable, a ajouté M. Bourita, faisant remarquer que « la pandémie s’arrêtera – le plus rapidement possible, nous le souhaitons – mais la migration, elle, restera ».
C’est pour cela, aussi, que la gouvernance de la migration ne répond pas – et ne doit pas répondre – à une gestion d’urgence, a-t-il insisté, expliquant qu’il s’agit « d’un terrain de responsabilité, par excellence ! » et qu’elle ne peut être déléguée, externalisée ou sous-traitée.
Il a dans ce sens rappelé que dans un message adressé aux participants à la Conférence de Marrakech de décembre 2018, le Souverain avait affirmé que « Le Pacte Mondial n’est pas une fin en soi. Il ne fait sens que par sa mise en œuvre effective ».
Le ministre a par ailleurs relevé que le Maroc avait exprimé dès février 2020 au plus haut niveau sa volonté d’accueillir cette conférence, rappelant que Sa Majesté le Roi Mohammed VI – dans le cadre de Son mandat de Leader sur la Question de la Migration en Afrique – l’a souligné dans Son rapport au 33 ème Sommet Ordinaire de l’Union Africaine.
Cette conférence est conçue dans l’objectif d’examiner, ensemble, la mise en œuvre en Afrique du Pacte de Marrakech, et de consolider des conclusions pour enrichir le Forum international d’examen des migrations, prévu en 2022, a expliqué le ministre.
Sur un autre registre, M. Bourita a affirmé que le véritable fléau, ce n’est pas la migration, mais la traite des êtres humains et le trafic des migrants, déplorant l’imaginaire faussé par les aprioris, qui perçoit les migrants comme moins humains d’un côté que de l’autre d’une frontière.
« La véritable anomalie, ce n’est pas que des femmes, des hommes et des enfants fassent le choix difficile d’émigrer ; mais que des passeurs exploitent leurs vulnérabilités », a dit M. Bourita.
Le véritable écueil, c’est que les migrants soient les oubliés du développement, des pandémies et de l’équité sociale, a-t-il aussi déploré, soulignant que les migrants doivent être le véritable centre de gravité de politiques migratoires responsables, solidaires et conformes aux 23 objectifs du Pacte.
« Nous ne devons pas nous laisser prendre dans les travers de la ‘déshumanisation’ des migrants ; nous ne devons pas non plus nous laisser prendre dans la tendance de plus en plus visible au traitement de la migration comme un enjeu de politique sécuritaire, exclusivement », a-t-il conclu.
Organisée à l’initiative de la Commission économique des Nations Unies pour l’Afrique (CEA), de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) et du Réseau des Nations Unies sur les migrations, cette conférence devra permettre aux États membres africains d’examiner les progrès nationaux, sous-régionaux et continentaux réalisés dans le cadre de la mise en œuvre des dispositions et objectifs du Pacte, à la lumière des nouveaux défis engendrés par la pandémie de la Covid-19.
Elle permettra, en outre, de partager les expériences, expertises et bonnes pratiques entre pays africains et mettre en lumière les contraintes auxquelles la région est confrontée et discuter des moyens d’y remédier, notamment en cette conjoncture de crise sanitaire mondiale.