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Le gouvernement libéral s’est engagé dans le budget 2021 à apporter des modifications à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique afin de promouvoir une main-d’œuvre plus diversifiée et plus inclusive.
Il promet également de dépenser 285 millions sur cinq ans pour recueillir des données ventilées qui aideront à comprendre les expériences des personnes racialisées au Canada.
Nicholas Marcus Thompson, l’un des 12 employés fédéraux à avoir intenté un recours collectif contre le gouvernement, dit que leur poursuite est l’une des raisons qui ont poussé le gouvernement fédéral à faire des promesses dans le budget.
Il juge que le gouvernement n’a pas besoin de cinq ans pour collecter des données ventilées afin de réaliser la sous-représentation des employés noirs dans les échelons supérieurs de la fonction publique et d’éliminer les obstacles auxquels ils sont confrontés.
« Le délai est très long. Les employés noirs, eux, continuent de souffrir et de se présenter au travail chaque jour en étant blessés, dit-il. Il y a beaucoup de problèmes de santé mentale associés à la discrimination, à la discrimination systémique, auxquels les employés noirs ont été confrontés et continuent de faire face. »
Les plaignants allèguent que les personnes racialisées ont été victimes de discrimination systémique dans l’embauche et les promotions pendant près d’un demi-siècle.
« Il existe un plafond de verre dès le bas de l’échelle de la fonction publique pour les employés noirs. Les échelons supérieurs sont réservés aux blancs », accuse M. Thompson.
Aucune des allégations des plaignants n’a encore été prouvée devant un tribunal. Une audience pour autoriser l’action collective est prévue en juin.
Un porte-parole du Conseil du Trésor, Martin Potvin, dit qu’il est prématuré de commenter la poursuite, mais que le gouvernement envisagera toutes les options, y compris un règlement à l’amiable, dans la mesure où il cherche à répondre aux préoccupations soulevées.
Discrimination systémique
Selon le président national de l’Alliance de la fonction publique du Canada, Chris Aylward, ce racisme est répandu. Il soutient que les possibilités de croissance ou d’avancement de carrière étaient limitées en raison de l’exclusion systémique des employés noirs.
« La fonction publique du Canada se présente comme étant fondée sur le mérite et souligne son caractère inclusif et non partisan, mais la discrimination et le racisme systémiques qu’on y constate démontrent que ce n’est pas la réalité, déclare-t-il. Il n’y a aucun doute dans mon esprit à ce sujet et ce n’est spécifique à aucun ministère ou organisme. C’est à l’échelle du gouvernement. »
Il a déclaré que les données actuelles collectées par le gouvernement permettent uniquement aux gens de s’identifier comme membres d’une minorité visible, de sorte que le nombre d’employés noirs travaillant à chaque niveau de la fonction publique n’est pas clair.
« Nous croyons que [les données ventilées] sont essentielles pour comprendre les disparités pour certaines communautés marginalisées au Canada, et en particulier la communauté noire », souligne-t-il.
M. Potvin reconnaît que davantage de travail est nécessaire pour éliminer les préjugés, les obstacles et la discrimination dans la fonction publique.
« Nous devons prendre des mesures délibérées et continues pour éliminer la discrimination systémique de nos institutions et de notre culture », dit-il.
La vice-présidente de l’Institut professionnel de la fonction publique du Canada, Norma Domey, la première cadre noire de l’histoire centenaire du syndicat, déplore que le processus de dotation dans la fonction publique ne soit pas transparent.
Mme Domey signale que 60 % des nominations n’avaient pas été affichées préalablement en 2020, comparativement à 29 % en 2016.
« C’est l’utilisation excessive de cette pratique qui exclut encore davantage les des groupes [marginalisées]. Étant donné la démographie et les préjugés des recruteurs, cela finit par être un énorme désavantage pour des gens comme nous », dit-elle.
Elle ajoute que les employés noirs craignent des représailles s’ils contestent le système.
Mme Domey a déclaré que le syndicat avait été initialement consulté sur les changements possibles à la Loi sur l’emploi dans la fonction publique, mais on ne sait toujours pas ce que compte proposer le gouvernement.
« Nous espérons qu’il y aura des progrès dans tout ce processus de dotation et dans la refonte de la Loi sur l’emploi dans la fonction publique. »
M. Potvin indique que ces informations seront disponibles une fois que le projet de loi aura été présenté au Parlement.
M. Thompson estime que le gouvernement devrait créer une catégorie distincte pour les employés noirs en vertu de la Loi sur l’équité en matière d’emploi afin de garantir une meilleure représentation dans la fonction publique. Il déplore que les Noirs fassent partie de l’ensemble du groupe des minorités visibles.
« Ce que nous avons vu, c’est que [la fonction publique] a systématiquement favorisé un ou deux groupes de toute la catégorie des minorités visibles. Ainsi elle satisfait aux exigences de la Loi sur l’équité en matière d’emploi. »
Source: La presse