Washington veut « revigorer » la relation canado-américaine

23 février 2021
Washington veut « revigorer » la relation canado-américaine

Assahafa.com

Après quatre années tumultueuses sous Donald Trump, la Maison-Blanche envoie le signal qu’elle veut donner un coup de barre dans la relation canado-américaine. Radio-Canada a appris que des engagements seront annoncés entre les deux pays, notamment en matière de développement d’une filière de véhicules électriques.

Joe Biden ne sera pas seul derrière son écran pour ce sommet virtuel avec le premier ministre Justin Trudeau, mardi. Plusieurs poids lourds de son administration seront présents, comme le secrétaire d’État Antony Blinken, Janet Yellen au Trésor, John Kerry, l’envoyé spécial du président sur les changements climatiques, et la vice-présidente Kamala Harris.

La présence des secrétaires à la Défense, à la Sécurité intérieure et aux Transports a également été évoquée. La liste officielle reste à finaliser.

Lors d’une séance d’information spéciale accordée à Radio-Canada, un haut responsable de l’administration Biden a insisté sur le fait que l’exercice n’a rien d’un sommet de routine.

Le premier ministre et le président annonceront, à la sortie de cette rencontre, une feuille de route avec une liste concrète de choses à faire pour revigorer le partenariat entre les deux pays.

Filière électrique

La relance économique postpandémie sera à l’ordre du jour, et parmi les dossiers prioritaires se trouvent le développement d’une filière électrique nord-américaine.

Radio-Canada a appris qu’au sommet Biden-Trudeau, les deux hommes vont s’engager à mieux collaborer pour devenir des leaders mondiaux dans le développement et la fabrication de piles de véhicules électriques. De hauts responsables américains et canadiens indiquent que ce sera un pan important de la relance verte et de la création d’emploi des deux côtés de la frontière.

En ce moment, la grande majorité des minerais rares qui servent à fabriquer ces piles sont produits en Chine. Les États-Unis veulent s’approvisionner au Canada afin d’éviter de dépendre du régime de Pékin, advenant le durcissement des sanctions économiques.

Il faut reconnaître que le Canada et les États-Unis ont une forte relation dans le domaine de l’énergie, qu’il faut sécuriser, indique une source américaine. Du côté canadien, on reconnaît qu’il s’agit d’une occasion de se positionner afin de faire partie intégrante d’une chaîne d’approvisionnement nord-américaine.

Ça nous permettra d’assurer le développement futur et la croissance de la filière électrique canadienne, dans le secteur automobile et de l’aérospatiale, indique une source gouvernementale canadienne.

Le gouvernement libéral avait déjà annoncé ses intentions dans le discours du Trône de novembre.

Buy American et protectionnisme

Du côté canadien, le resserrement récent des règles de la Buy American Act par le président Biden suscite des craintes.

Cet enjeu épineux sera au menu des discussions. Les Américains savent que nos chaînes d’approvisionnement sont interreliées, et ils sont sensibles à notre demande pour une exemption du Buy American, indique une source canadienne au fait des discussions.

C’est dans notre intérêt mutuel, avec le Canada, de nous consulter régulièrement et activement pour éviter des perturbations au commerce et à notre coopération économique, a souligné le responsable américain.

Lors du sommet, les deux pays devraient s’engager à préserver leurs chaînes d’approvisionnement et faire la promotion de l’économie nord-américaine, selon cette même source.

Malgré ces bonnes intentions, Bruce Heyman, ancien ambassadeur américain au Canada sous Barack Obama, rappelle que la Maison-Blanche donne la priorité à sa propre économie en ce moment. Des millions d’Américains sont sans emploi. La priorité du gouvernement, c’est de leur trouver du travail, souligne-t-il.

Mais l’ancien diplomate se veut rassurant et rappelle que l’adoption de mesures protectionnistes de ce type au sud de la frontière n’est pas nouvelle.

Historiquement, il y a eu des exceptions qui ont visé de nombreuses sociétés et entreprises canadiennes, rappelle-t-il, en ce qui concerne l’approvisionnement de biens et de services cruciaux.

Michael Kergin, ancien ambassadeur canadien aux États-Unis, va dans le même sens. Je pense que nous avons de bonnes cartes [dans notre manche], car les économies sont très intégrées, fait-il remarquer.

Dans le but de rebâtir nos deux économies et de s’aider mutuellement à se remettre de la COVID, il faudra travailler ensemble par l’intermédiaire de nos projets d’infrastructures, estime quant à elle Maryscott Greenwod, PDG du Canada-American Business Council.

Le sort des deux Michael

La rencontre virtuelle sera aussi l’occasion de soulever le sort de Michael Kovrig et Michael Spavor, deux Canadiens détenus en Chine depuis plus de deux ans. Deux ans de trop, a souligné le haut responsable de l’administration Biden.

Cette question sera assurément discutée entre les deux leaders afin de déterminer comment nous pouvons travailler ensemble pour garantir la libération des deux Michael. C’est une priorité pour le Canada, c’est une priorité pour nous, a indiqué cette source américaine.

Or, l’ancien ambassadeur Michael Kergin a peu d’espoir que la rencontre bilatérale officielle fasse beaucoup avancer leur sort à court terme. Depuis des semaines, Joe Biden affirme qu’il ne veut pas s’ingérer dans les affaires du département américain de la Justice.

Du progrès sur les vaccins?

Nous allons annoncer des plans, demain, pour collaborer à la livraison de vaccins, a fait savoir la source américaine, qui rappelle que des mécanismes sont déjà en place entre les deux pays en matière de partage d’information et de recherche.

L’annonce de mardi pourrait notamment toucher le programme COVAX qui vise à assurer une distribution et un accès équitables à l’échelle mondiale.

Avant de pouvoir rouvrir notre économie, il faut en finir avec la COVID partout dans le monde, a déclaré une source canadienne.

Jusqu’ici, le Canada a été privé des doses de vaccins produites en sol américain, parce que les États-Unis veulent donner la priorité à leurs citoyens. Cela pourrait-il changer? Le Canada pourrait-il profiter d’un assouplissement?

Considérant l’ampleur de la circulation et du commerce entre nos pays, nous voulons nous assurer que le Canada et le Mexique se remettent de la pandémie. Nous aurons plus à dire demain, s’est contenté de dire le haut responsable américain.

Format virtuel et inhabituel

Techniquement, c’est le président Biden qui est l’hôte de cette rencontre, même si elle se déroule de façon virtuelle. La rencontre devrait en principe durer deux heures. La première partie se déroulera avec un groupe restreint de ministres. La deuxième partie inclura une dizaine de ministres canadiens et de secrétaires d’État américains.

Quand le sommet sera terminé, les deux chefs d’État feront une déclaration publique commune, mais ne répondront pas aux questions des journalistes.

Le simple fait que cette rencontre soit la première du genre pour l’administration Biden depuis son assermentation est très symbolique, relève Raymond Chrétien, ex-ambassadeur du Canada à Washington. D’autant, ajoute-t-il, que le tête-à-tête n’est pas exclusivement entre Joe Biden et Justin Trudeau, mais concerne une bonne partie de leur équipe.

C’est un très bon signe qu’on soit sur la même longueur d’onde dans plusieurs dossiers, comme la pandémie, les changements climatiques, la lutte contre les inégalités raciales, indique une source canadienne, et cela se reflétera dans les annonces à la suite de la rencontre.

L’ancien ambassadeur américain Bruce Heyman affirme que c’est un nouveau chapitre qui commence et grâce auquel le gouvernement Trudeau va retrouver confiance, honnêteté, intégrité, valeurs communes et un gouvernement plus aligné sur le Canada, croit-il.

Source: Radio-Canada

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